MM. Hamadé, de Charette, Hariri et Bouez.
Après avoir salué l’ancien chef du Quai d’Orsay pour avoir
appuyé, il y a quatre ans, la position de son pays auprès
du gouvernement libanais, par une médiation soutenue entre Beyrouth,
Damas et Tel-Aviv, l’ancien Premier ministre a rappelé l’épouvantable
attaque israélienne en avril 1996 qui a ému le monde et l’amitié
sincère que le Liban a retrouvée auprès de certains
pays ayant conduit à l’arrangement d’avril.
M. Hariri rend hommage aux civils libanais victimes des attaques israéliennes
et à la résistance de l’ensemble du peuple libanais; à
la Résistance libanaise pour son rôle primordial dans la libération
du territoire; à la Syrie et, notamment, à son chef, le président
Hafez Assad “qui a multiplié les actions pour sauver notre pays”;
à la France pour son amitié et son intervention diplomatique
positive; aux pays arabes et alliés pour leur appui; à l’information
locale, arabe et internationale qui a révélé le véritable
visage d’Israël et permis au Liban de défendre sa juste cause.
Enfin, M. Hariri a clos son intervention en reconnaissant la concomitance
des positions avec la Syrie et son commandement, face aux pressions israéliennes.
Après avoir évoqué certains souvenirs liés
à sa mission au Proche-Orient, en avril 96, notamment son sentiment
après le drame épouvantable de Cana et à la suite
duquel Israël a compris que ses tentatives étaient vaines,
M. de Charette a voulu en tirer quelques leçons :
l Le Liban, victime du conflit israélo-arabe, éprouve
un sentiment profond d’injustice, ce qui met au défi son peuple
et ses dirigeants de préserver la grandeur, la nature et le caractère
de leur pays, pour rester soi-même dans un environnement difficile
et prendre comme l’a fait M. Hariri, “sa canne et son chapeau et aller
frapper aux portes du monde”.
l La France, si elle le veut, peut changer la donne dans cette région.
Se rappelant de la perplexité du peuple français quant à
l’opportunité, à l’époque, de la démarche de
son ministre des Relations extérieures, il l’a simplement résumée
à ce qu’elle signifiait que la France était de retour dans
la région pour obtenir la légitimité de facto de la
Résistance et mettre un dispositif à bénéfice
partagé devant veiller sur la protection civile des deux camps.
Pour donner naissance à un tel groupe de surveillance, elle devait
souscrire à trois conditions: accepter de prendre des risques, confronter
ses partenaires américains qui considéraient être les
seuls à avoir des intérêts vitaux dans la région;
enfin, faire face au débat intérieur des Français.
Si l’arrangement d’avril 1996 a été si performant,
c’est parce qu’il ne prévoyait ni vainqueur ni vaincu et envisageait
une solution régionale entre le Liban, Israël et la Syrie;
enfin, parce que dans le comité de surveillance, auprès des
Etats-Unis, se trouvait la France.
M. de Charette conclut son intervention en rappelant que l’étape
transitoire ayant duré quatre ans, était maintenant révolue,
que les nouvelles perspectives du retrait israélien sont positives;
et qu’il revenait, évidemment, aux Libanais de prendre leur destin
en main.
M. Bouez a, également, remercié de sa présence
M. de Charette qui a “spontanément et intuitivement compris un Liban
en douleur”, a bien prouvé qu’en France, le cœur bat au rythme du
Liban et que le pacte franco-libanais tenait toujours.
Précisant que l’Histoire du Liban est lourde de conquêtes
et de complots; qu’il est malgré tout hanté par la rage de
vivre, l’ancien ministre des Affaires étrangères rappelle
les principales étapes de l’opération “Grappes de la colère”
avec les 1.000 raids, les 11.000 bombes de toutes sortes qui ont provoqué
l’exode, les blocus et, enfin, la tragédie de Cana qui a fait 155
victimes. Attaque dont Israël peut se vanter d’avoir obtenu des résultats
militaires, mais qui lui a fait néanmoins subir un échec
politique (probablement à l’origine de l’éviction de Pérès),
la communauté internationale ayant compris que c’était trop.
Aussi a-t-elle envoyé ses émissaires pour consolider sa présence,
ce qui a abouti aux accords d’avril, qu’Israël a tenté de ne
pas respecter mais qui signifiaient pour le Liban qu’il était en
droit de demander la paix, la reconnaissance de son droit à la résistance
et que ses actions étaient dorénavant qualifiées d’autodéfense
et non plus de terroristes.
Se félicitant de la position commune du Liban et de la Syrie,
M. Bouez souligne que l’arrangement d’avril n’a pas été un
substitut aux résolutions 425 ou 242, comme Israël a voulu
le considérer, mais a été un cadre pour le retrait
de l’ennemi.
Considérant ce retrait promis, le trouvant obscur et confus
sans aucune précision géographique, ou qualitatif, M. Bouez
préconise la nécessité du maintien du comité
de surveillance jusqu’à la fin totale du retrait et pour le Liban,
de rester fidèle à la légalité internationale,
sans modification de résolution, pour ne pas en subir les retombées
négatives et, enfin, l’urgence d’un climat intérieur d’entente
et non de défi.
Quelques brèves questions de l’assistance ont permis enfin à
M. Hervé de Charette de réaffirmer la position toujours égale
à elle-même du président Chirac après les dernières
déclarations “tumultueuses” de M. Jospin, le rôle résolument
interventionniste de la France dans la région riveraine de la Méditerranée
et son désir de passer de la diplomatie contemplative qu’elle avait
à l’égard de la région il y a quelques années,
en se contentant d’accompagner la stratégie des autres, à
la diplomatie active et volontariste qui nécessite de l’énergie,
de la subtilité, des démarches qu’elle juge désormais
vitales pour ses intérêts à travers un partenariat
intense.
DE CHARETTE À CANA
M. de Charette fleurissant les tombes des martyrs à Cana, en présence de Mmes Hariri et Lecourtier, épouse de l’ambassadeur de France. Venu au Liban à l’invitation de Mme Bahia Hariri, député
du Liban-Sud, pour participer à la commémoration des martyrs
de l’opération israélienne d’avril 96, les “Grappes de la
colère”, M. Hervé de Charette, ancien chef du Quai d’Orsay,
s’est rendu dans cette localité sudiste pour se recueillir devant
les tombes des martyrs et les fleurir.
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