Bloc - Notes

Par ALINE LAHOUD
ENTRE LE MARTEAU ET L’ENCLUME
Chaque fois qu’Israël utilise ses armes les plus sophistiquées pour assassiner des femmes et des enfants libanais, il déclenche le mécanisme d’un phénomène qui se manifeste par une déclaration d’amour du côté américain.
Inutile de dire que ce n’est pas nous qui sommes l’objet de cette étrange ferveur. Pour la Maison-Blanche, comme pour le Département d’Etat, bouffer du libanais relève, non pas du génocide ou du crime contre l’humanité, mais du sport, une sorte de super-bowling, tout ce qu’il y a de plus licite, qu’on finira bien un jour par inscrire aux Jeux Olympiques.
Effectivement, après le raid contre Habbouche, qui a fait des dizaines de blessés, dont six enfants entre 3 mois et 10 ans et tué deux femmes, toutes deux mères de famille, Madeleine Albright ne trouve rien de mieux à dire que de se précipiter devant le premier micro pour assurer Barak de son soutien indéfectible et lui jurer amitié et protection “tant que le ciel existera” (sic). Ce ciel que les deux complices s’acharnent à nous faire tomber sur la tête.
Selon le code moral et sentimental en honneur à Washington, lorsque les forces armées du “bien-aimé” Israël massacrent femmes et enfants libanais, c’est de la légitime défense (contre des civils désarmés), mais lorsque la Résistance libanaise tente de débarrasser le pays de l’occupation sioniste et de faire libérer des dizaines de Libanais détenus et torturés dans les geôles israéliennes, c’est du terrorisme, synonyme de crime contre l’humanité.
De quelle humanité s’agit-il? De celle nécrophage israélienne - de Ben Gourion à Barak, en passant par Golda Meir, Pérès et Netanyahu - qui, depuis plus d’un demi-siècle, se nourrit de cadavres, tant de ceux des fours crématoires nazis, utilisés comme instrument de chantage à la pitié internationale, que de ceux des populations civiles libanaises dont elle use à la fois comme moyens de pression et messages?
Ne sommes-nous là que pour servir de boîte aux lettres pratique et sans risques, une sorte de E-mail porteur de tous les virus informatiques et politiques, adressé à la Syrie? Après tout, pourquoi se gêner, du moment que nous semblons étrangers nous-mêmes à notre propre sort, ayant délégué à d’autres - de gré ou de fait - le soin de décider de notre destin?
Comment, autrement, expliquer notre absence de la rencontre de Palmyre entre l’Arabie saoudite, l’Egypte et la Syrie, alors qu’on y débattait d’une situation dramatique dont nous sommes le centre? Comment expliquer que nous ne soyons jamais présents à un important sommet tel celui du Caire qui a réuni les présidents syrien et égyptien?
Qui essaie de nous venir en aide ou simplement de demander notre avis? L’Amérique qui offre une aide massive à Israël et joue à l’ONU les bons apôtres? Ou bien les Arabes qui nous ont promis, pour emporter le morceau à Taëf, plusieurs milliards de dollars dont - onze ans après - nous n’avons pas encore vu le premier sou?
Devons-nous continuer à servir de laboratoire du Dr No, tant à l’empire américain qu’à l’Etat d’Israël et de bouclier aux Arabes, sans obtenir en retour de ces derniers que des déclarations creuses, un soutien platonique et des prêts à intérêts composés? Quant à l’essentiel, tout le monde semble s’en laver les mains!
Et à propos de se laver les mains, n’est-ce pas Gebrane K. Gebrane qui écrivait dans “Jésus Fils de l’Homme”:
“Ponce Pilate est (toujours) là...
“Jusqu’à présent, il n’a pas fini de se laver les mains.
“Jusqu’à présent, Jérusalem porte la bassine et Rome le broc.
“Et entre les deux, mille et mille mains se tendent pour se laver”... 

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