Secrétaire
du “Bloc de la libération et du développement”, groupe parlementaire
dont le président Nabih Berri est le chef de file, M. Ahmed Soueid,
natif du Arkoub, zone chaude dans le dossier du retrait israélien,
mène une campagne incessante en faveur des fermes de Chébaa,
se conformant en cela à la consigne du chef du Législatif.
Et ce, afin de confirmer qu’il s’agit d’une “terre libanaise”, ainsi que
l’attestent les titres de propriété des biens-fonds qu’y
possèdent les habitants de cette localité sudiste.
Il est à noter que cet entretien a eu lieu avant le début du retrait israélien. |
Tout d’abord, il réfute l’allégation d’Israël selon
laquelle le retrait du Sud et de la Békaa-ouest a été
décidé en application de la résolution 425 qu’il avait
totalement ignorée depuis son adoption par le Conseil de Sécurité
en 1978. “En fait, l’Etat hébreu évacue la région
frontalière, suite aux coups durs qui lui ont été
assénés par la Résistance.”
Cependant, il craint comme beaucoup de Sudistes que le retrait s’effectue
d’une manière inattendue et plus tôt que prévu,
dans le but de perturber la situation dans la partie méridionale
du Liban.
M. Soueid affirme que les fermes de Chébaa sont situées
sur le versant ouest du mont Hermon (Jabal el-Cheikh). Cette région
qui s’interpénètre, en certains endroits, avec le territoire
syrien, est exclusivement libanaise sans aucun lien avec le Golan occupé.
CHÉBAA NE PEUT ÊTRE RATTACHÉ
AU GOLAN
Israël s’emploie à y faire perpétuer son occupation
qui remonte à 1967 et pour y maintenir les “fellashas” (juifs d’Ethiopie)
qui n’ont pu s’intégrer dans la société israélienne
en raison de leur sous-développement.
L’Etat hébreu veut inclure Chébaa dans le dossier devant
faire l’objet, ultérieurement, des négociations syro-israéliennes,
auquel doit s’appliquer, à son sens, la résolution 242 ou
337 (et non 425) du Conseil de Sécurité.
Seriez-vous parmi les premiers à vous rendre dans les régions
que “Tsahal” évacuera?
Sans nul doute. Depuis 1977, je n’ai pu accéder à ma
maison à Kfar-Hamam et je suis impatient d’y retourner.
Que préparez-vous à ce secteur du Sud qui était
coupé de la mère-patrie depuis près d’un quart de
siècle?
Nous comptons sur les promesses de l’Etat qui, par la voix du président
de la République, s’est engagé à rendre justice aux
régions sudistes qui ont tant pâti de l’occupation.
QUID DES “COLLABORATEURS”?
Et comment concevez-vous la manière de traiter le problème
des personnes ayant collaboré avec l’ennemi?
Nous répartissons les collaborateurs en trois catégories:
Primo, ceux engagés, idéologiquement avec Israël
qu’ils considèrent comme l’allié, le voisin, l’ami et le
refuge. Cette catégorie ne peut bénéficier de l’amnistie.
Secundo: les “mercenaires” qui ont rallié la milice de
Lahad pour assurer leur subsistance et celle de leurs familles.
Tertio, la catégorie ayant été forcée
à s’enrôler, dans ce qu’on appelle l’Armée du Liban-Sud.
A ce propos, je cite le cas d’un jeune homme qui a été contraint
de rallier l’ALS: ayant réussi à fuir et à se livrer
à l’Armée libanaise, il s’est mis à la disposition
du tribunal militaire qui l’a condamné à un an de prison.
Cinq autres cas s’étant présentés, j’en avais
ouvert question au général Emile Lahoud, alors commandant
en chef de l’Armée; puis, au président Elias Hraoui et j’ai
pu les faire bénéficier de l’amnistie.
Cependant, on ne peut comparer le cas des effectifs de l’ALS à
celui des membres des anciennes milices qui se sont affrontées durant
la guerre libanaise. Laissons donc à la Justice militaire l’entière
latitude de juger chaque cas à part et d’infliger aux prévenus
une sanction à la mesure du degré de culpabilité de
chacun d’eux.
... ET DES DÉTENUS DANS LES GEÔLES
D’ISRAËL?
Et qu’en est-il des personnes détenues à Khiyam et
dans les geôles israéliennes?
Elles doivent être libérées avant le retrait israélien
ou simultanément avec le départ du dernier soldat ennemi,
sinon l’opération serait incomplète ou inachevée.
On doit craindre que les Israéliens se vengent sur ces détenus,
pour couvrir le revers qu’ils ont subi en évacuant notre territoire
par la contrainte et sous la pression de la Résistance.
LES LÉGISLATIVES POURRAIENT ÊTRE
REPORTÉES
L’échéance électorale est proche. A l’ombre
de ce qui se passe au Liban-Sud en prévoyez-vous le report?
“Personne ne peut garantir que les élections auront lieu à
la date prévue, Israël, ennemi perfide et rusé, est
contraint de se retirer. Que nous cache-t-il après son retrait?
Nous sommes sur le qui - vive, tout événement dangereux pouvant
influer sur le processus électoral et détourner les organismes
de sécurité et l’armée de leur tâche de contrôle
du scrutin.
Etes-vous candidat aux élections?
Avec la loi actuelle et le découpage des circonscriptions, la
candidature dépend de celui qui forme les listes. Jusqu’à
présent au Liban-Sud, cette question n’a pas été tranchée.
A sept mois des élections, la coalition entre “Amal” et le “Hezbollah”
a été confirmée et elle sera la principale.
Figurez-vous dans cette coalition?
Je l’espère. Dans une circonscription comme la nôtre,
personne ne peut faire cavalier seul.
Je ne peux pas faire partie d’une autre coalition dont l’idéologie
et les principes sont contraires aux miens. Depuis ma jeunesse, je me battais
contre la liste des Assaad. Je menais campagne seul et il était
impossible que je gagne. Aussi, l’adhésion à une liste de
coalition est-elle essentielle. En 1996, cette coalition a été
imposée. Aujourd’hui, la même conjoncture l’impose mais d’une
façon délibérée, dans l’intérêt
du Sud et du Liban.
AFFINITÉS AVEC BERRI
Après huit ans de participation au “Bloc de la libération
et du développement”, comment évaluez-vous votre position,
vos relations avec son président et l’action du bloc?
Mes relations avec le président Berri sont anciennes. C’est
un collègue auquel me lient la même idéologie, le nationalisme
arabe et le même système politique. Il est comme moi contre
le féodalisme au Liban-Sud et tente d’y changer l’équation.
Notre coopération durant les huit dernières années
était étroite. Le fait que je sois le secrétaire général
du “Bloc” et son porte-parole prouve la confiance du président Berri
à mon égard.