DESTINATION ISTANBUL ET BURSA:
LA MAGIE DU TOURISME CHAVIRE ENTRE LE PASSÉ ET LE PRÉSENT

Istanbul, cité aux civilisations multiples, a connu gloires et chutes d’empires. Pour un voyageur des temps modernes, cette ville de Turquie serait une destination rêvée. Seule métropole du monde couchée aux bords de deux continents, l’Asie et l’Europe, Istanbul recèle un cachet unique, résultat d’un mélange ethnique orientalo-occidental. Ce voyage fait à l’invitation du ministère turc du Tourisme, avait pour but de montrer que cette région ne se porte pas plus mal que l’opinion mondiale pourrait le croire. Un an plus tôt, rappelons-le, une série de séismes a ravagé et tué par dizaines de milliers de personnes. Du temps aussi a passé depuis la capture d’Ocalan, chef du PKK, au Kenya et son transfert en Turquie où il demeure emprisonné, ce qui a déclenché des heurts entre ses partisans et les autorités turques.
En quelques mots, cette tournée à laquelle étaient invités une trentaine de journalistes et d’agents de voyage des pays arabes, avait pour but de faire savoir que de l’eau a coulé sous les ponts et que le tourisme est sur le point de réoccuper une place de choix parmi les pays touristiques.

De l’eau a coulé sous les ponts, ce ne serait pas uniquement une métaphore, étant donné la spectaculaire vue du pont sur le Bosphore. Cette merveille de l’architecture suspendue ainsi que celle du pont Fatih Sultan Mehmet relient les deux continents entre eux. Un lien qui vous transporte d’une époque à l’autre. De part et d’autre de la ville, des vestiges vous transmettent par flashs intermittents des visions de ce qu’a pu être ce berceau des civilisations.

UN PEU D’HISTOIRE
En 658 av. J.-C., une armée conduite par le roi Byzas se colonisa sur la côte européenne face aux “pays des aveugles”, tel que le lui a prédit l’oracle de Delphes. Stratégiquement parlant, cet endroit jouit d’une bonne position, car le détroit du Bosphore met en communication la mer Noire et la mer Marmara. Le Bosphore forme, également, un port naturel protégé, étroit et allongé, appelé couramment la Corne d’Or. Diverses civilisations s’ensuivirent. La ville de Byzantion fut conquise à tour de rôle par les Perses de Darius (513 av. J.-C.); puis par Pansanias, roi de Sparte. Philippe II de Macédoine, père d’Alexandre le Grand, l’assiéga en vain (340 av. J.-C.). L’empereur romain Septime Sévère la conquit en 196 ap. J.-C. Après le déclin de Rome, Constantin réunit au IVème siècle, les deux parties de l’Empire et consacra la ville “nouvelle capitale impériale” appelée Nova Roma; puis, Constantinople. Le sultan Mehmet II pénétra dans la cité en mai 1453 et reçut le nom de Fatih, le conquérant. La ville acquit, alors, un cachet islamique en sus du cachet chrétien. Capitale de l’Islam, abritant la résidence du Calife, chef spirituel des musulmans, en la personne du sultan, elle fut aussi celle de l’Empire ottoman qui fut démembré en 1918 par les Alliés. L’instauration de la République par Mustapha Kemal Atatürk consacra Ankara capitale, mais Istanbul garda son privilège en tant que ville principale du pays.
En découvrant la Mosquée Bleue, il vaut mieux cligner des yeux plusieurs fois, car sous les rayons forts du soleil, on pourrait se croire en plein mirage, une merveille architecturale qui se dresse vers le ciel avec ses six minarets, ses coupoles, ses demi-coupoles. A en croire la légende, la Mosquée Bleue aurait pu être la Mosquée d’Or. Le sultan Ahmed qui a ordonné sa construction à un élève du grand architecte Sinan, lui aurait, paraît-il, demandé d’élever une mosquée “couverte d’or”, mais le jeune architecte a confondu avec “six minarets”, deux termes presque semblables en turc. Et nous voici avec la seule mosquée au monde ayant six minarets. La mosquée Sainte Sophie est à l’origine une basilique construite par Constance II. Ravagée par un incendie en 532, l’empereur Justinien la reconstruisit à l’image d’un songe de gloire qu’il fit. L’église, dédiée à la Sainte Vierge, renferme des fresques murales et des mosaïques de grande valeur. La transformation de l’église en mosquée se fit le jour même de la conquête de Constantinople par le sultan Mehmet II. Atatürk, en fin de compte, la transforma en musée byzantin et ottoman, en hommage à un passé cosmopolite. Autre visite, celle de l’hippodrome construit par Septime Sévère. Tout au long se dressent trois colonnes. La première est un obélisque égyptien, cadeau fait à l’empereur Théodose. Une autre colonne serpentine élevée au site de Delphes et l’obélisque de Constantin Porphyrogénète.
 

Vue du pont sur le Bosphore.

Les thermes de Yalova.

BURSA, CITÉ ANTIQUE
Au bout de cinq heures de route d’Istanbul avec une traversée en ferry de la mer Marmara, nous attend la ville de Bursa. La province située sur la côte asiatique, couvre une superficie de 11.027 km2. La ville de Bursa où nous séjournerons deux jours est une ville ancienne dont les vestiges remontent à 2700 av. J.-C. Les Perses, Alexandre  Le Grand et Hannibal le Carthaginois l’ont occupée. Bursa est connue pour ses thermes et son eau bénéfique. Résidentielle ayant un cachet quelque peu bourgeois, c’est, également, un centre industriel important. Tout au long de la route qui y mène, des carrières et des usines de céramiques, des manufactures de voitures et de textiles s’étendent à perte de vue.
Toutefois, cette agglomération industrielle n’a aucune prise sur l’air que l’on respire. Il est curieusement chargé de senteurs fraîches, peut-être grâce aux grandes forêts de conifères qui recouvrent les flancs des montagnes environnantes. Un téléphérique nous conduit au dessous de cette immensité de verdure, à près de deux mille mètres d’altitude. Là, à l’hôtel Grand Yasici, célèbre station de ski, nous déjeunons en plein air.
 

Le dimanche précédant la finale 
de l’UEFA, le stade de Galatasaray 
était plein à craquer.

La reprise du tourisme: thème d’une 
conférence de presse à Bursa.

À YALOVA, ÉPICENTRE DU SÉISME DE 99
Le chemin de retour vers Istanbul, fut le lendemain, avec un détour à Yalova, village siège de l’épicentre du séisme de 99. Lors de la conférence de presse donnée par les représentants du ministère du Tourisme et les directeurs des agences de voyage à Bursa, l’une de nos préoccupations majeures était le tremblement de terre. Nous connaissions son ampleur par les médias, mais quel risque prendrons-nous en nous trouvant dans cette région? Les autorités ont-elles pris les précautions pour faire face de nouveau à de nouvelles secousses telluriques? La réponse à la première question est simple, mais se rattache à la probabilité. Un séisme d’une telle ampleur n’arrive que tous les 250 ans. Des experts parcourent les villes et inspectent les immeubles en voie de fortification. Les municipalités ont acquis du matériel de secours: tentes, vêtements, médicaments, etc... D’ailleurs, comme nous en sommes témoins, il reste peu de traces du tremblement précédent. Les débris ont tous été déblayés, seules, restent quelques lézardes dans des immeubles en voie de restauration. Le gouverneur de Yalova, nous a accueillis en personne et accompagnés durant notre visite des thermes, de la maison de campagne de Atatürk, du musée de la nature, où plus de 10.000 espèces végétales sont entretenues dans un cadre féerique.


Porte monumentale du Çiragan Palace donnant sur le Bosphore.

Nous sommes entrés dans la tannière du séisme et en sommes ressortis enchantés. Le peuple turc a dû faire preuve d’une survie sans pareille pour laisser au passé ses blessures et se tourner avec courage vers l’avenir. Le pullman de Mercan Travel (prononcer Merjan) nous ramène à Istanbul pour encore deux nuits, toujours guidés par une équipe compétente présidée par son P.D.G., M. Cüneyt Mengü. Avec Wissam, Arzu, Ecin, Istabraq et leurs collaborateurs, nous avons passé des jours où convivialité et bonne entente étaient de mise. Des promesses de contacts futurs ont été échangées entre la délégation libanaise formée de Charbel el-Khoury, organisateur de voyages; Patrick Karamé (“L’Orient-Le-Jour”), Hélène Rechmany (“La Revue du Liban”) et les membres des délégations des pays arabes. Mais le voyage est trop court, entrecoupé de visites d’hôtels prestigieux et de restaurants renommés, de part et d’autre des deux villes, Istanbul et Bursa. Nous retournons au pays enrichis de souvenirs, d’adresses notées à la hâte et de cartes de visite, avec le vœu solennel d’y retourner un jour.

HÉLÈNE RECHMANY

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