Naturellement, il faut déplorer l’incident qui s’est produit
à Rmeiche, dont a été victime le regretté Georges
Khalil el-Hajj “qui était un fervent partisan de la paix, fermement
attaché au Liban et à sa famille”, pour reprendre les propres
termes de Mgr Maroun Sader. Dans son oraison funèbre, l’éminent
prélat a rappelé que les parents de la victime avaient été
assassinés par l’ennemi israélien, au moment où ils
vaquaient à leurs occupations sur leur champ de tabac. Cependant,
Mgr Sader a assuré que “cet incident n’affectera nullement le climat
de fraternité et d’unité que tous les habitants sudistes
tiennent à sauvegarder à tout prix”. Il y a lieu de signaler,
également, les quelques vols ou tentatives de cambriolages de maisons,
dont les auteurs étaient des “éléments étrangers”,
comme on l’a vu sur le petit écran. Ainsi que le rassemblement de
Palestiniens près de la “porte de Fatima”, pour soi-disant “libérer
la Palestine spoliée par l’ennemi sioniste”...
En tout cas, dès la fin du retrait de
“Tsahal”, l’attention a été entièrement braquée
sur l’étape d’après la libération, l’action devant
être axée sur deux points prioritaires: Primo, l’intégration
des régions libérées à tous les niveaux, afin
de les rattacher au pays dans tous ses secteurs. Secundo, la consolidation
de la sécurité et de la stabilité dans la zone frontalière,
de manière à garantir les droits du Liban dans sa terre et
ses eaux. A cet effet, M. Terjé Roed-Larsen, envoyé spécial
du secrétaire général de l’ONU, est venu une fois
de plus à Beyrouth, dans le cadre d’une nouvelle tournée
proche-orientale qui l’a conduit à Tel-Aviv; puis, à Damas,
pour revenir par la suite dans la capitale libanaise.
L’émissaire de M. Kofi Annan a précisé aux responsables
libanais que sa mission consistait, principalement, à s’assurer
du retrait israélien et, partant, à définir le rôle
dont doit s’acquitter la FINUL dans la région frontalière,
tout en aidant l’Etat libanais à étendre sa souveraineté
à l’ensemble de son territoire jusqu’aux frontières internationalement
reconnues. Ses interlocuteurs officiels ont fait part de leur intention
d’exiger d’Israël des dédommagements pour le préjudice
énorme causé par ses agressions contre le Liban depuis 1978.
A la fin de ses entretiens à Beyrouth, M. Larsen a précisé
que l’affaire de Chébaa résultait de l’absence d’un tracé
international des frontières séparant le Liban de la Syrie,
un tel document n’étant pas enregistré auprès des
Nations Unies. Il a ajouté que cette question était d’ordre
“technique” plutôt que “politique”, l’unique ligne indiquée
sur la carte, étant celle fixée en 1978, sur la base de laquelle
a été déployée la force - tampon internationale
sur les hauteurs du Golan, avec l’approbation des gouvernements libanais
et syrien, en accord avec le Conseil de Sécurité. M. Larsen
a conféré longuement avec le président Nabih Berri,
car le chef du Législatif a exhibé des documents irréfutables,
confirmant la “libanité” des fermes de Chébaa, des modifications
ayant été apportées à la carte après
1974. “L’application de la résolution 425 demeurera incomplète,
a dit M. Berri, tant que les Israéliens n’auront pas évacué
les hameaux de Chébaa”. Tout en réaffirmant la détermination
du Liban à coopérer avec l’organisation internationale et
en se faisant l’écho de l’appréciation, par les Sudistes,
de son rôle dans le passé et à l’avenir. Le président
de la Chambre a mis l’accent, d’autre part, sur la nécessité
de procéder au déminage des zones évacuées
par “Tsahal” et, aussi, de procéder à la remise en état
des infrastructures des villages sudistes au plan de l’électricité,
de l’eau, des routes, du téléphone et de l’environnement.
Au cours de sa tournée, jeudi dernier, dans les villages libérés,
le président Salim Hoss a promis l’aide de l’Etat aux habitants
de ces localités, alors que la commission ministérielle ad
hoc siégeait au sérail de Nabatieh, sous la présidence
de M. Michel Murr, ministre de l’Intérieur. Elle devait tenir une
autre réunion mardi et délibérer durant près
de cinq heures sur les moyens à mettre en œuvre pour hâter
la reconstruction du Liban-Sud. D’ailleurs, la visite effectuée
par le président Emile Lahoud, le lendemain du retrait israélien,
a eu pour conséquence de redonner confiance aux habitants et, aussi,
de réactiver les organismes étatiques chargés de réhabiliter
les services locaux en vue d’assurer l’eau, l’électricité
dans un premier temps et, par la suite, le téléphone et les
moyens de communication, afin de sortir le Sud de l’isolement dans lequel
l’avait placé l’occupation ennemie. Fait à signaler: c’était
la première visite d’un chef de l’Etat dans la partie méridionale
du pays depuis l’avènement de l’indépendance.
Le président de la République a donné ses instructions
pour mettre fin aux vols qui se sont produits les premiers jours, surtout
à Kleyha et Marjeyoun. A cet effet, l’Armée a dressé
des barrages où il était procédé à la
vérification de l’identité des personnes se rendant aux villages
libérés et à la fouille des camions chargés
de mobilier ou tous autres objets qui auraient pu faire l’objet de vol.
Il faut dire que les rencontres entre les hommes de religion chrétiens
et mahométans ont contribué à calmer les esprits et
à dissiper les craintes, en attendant le déploiement de l’Armée,
après que la FINUL se sera assurée du retrait israélien
de la zone frontalière. Les experts des Nations Unies, notamment
les cartographes ont procédé, de leur côté,
à un constat sur le terrain du tracé de la frontière,
en coopération avec des spécialistes libanais. Et ce, après
que le président de la République eut refusé la logique
de ce qu’on appelle “les frontières pratiques” (ou du fait accompli).
Le chef de l’Etat a, également, insisté sur la nécessité
de libérer les fermes de Chébaa faute de quoi, le retrait
israélien serait considéré comme incomplet. Le président
Lahoud a réclamé la libération des Libanais détenus
dans les geôles israéliennes, en tête desquels cheikh
Abdel-Karim Obeid et Hajj Moustapha Dirani ainsi que la remise des dépouilles
de neuf résistants tombés lors d’affrontements avec l’armée
israélienne au Liban-Sud. Cela dit, il nous faut revenir à
la séance que la Chambre des députés a tenue mercredi
à l’école secondaire de jeunes filles à Nabatieh,
en présence de MM. Mohamed Baalbaki et Melhem Karam, présidents
des Ordres de la Presse et des journalistes, l’ordre du jour ayant comporté
un point, sans plus: l’examen du plan gouvernemental pour la reconstruction
des régions libérées. Le Liban, apprenons-nous, s’attend
à recevoir une aide arabe, celle-ci étant venue, tout d’abord
de l’Emir de Qatar, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani qui a fait don de
sept millions de dollars. L’Etat des émirats arabes unis lui emboîtera
le pas. En effet, au terme d’une tournée au Sud, cheikh Mohamed
Ben Rached Al-Maktoum, ministre émirati de la Défense, a
appelé les Etats frères à venir en aide au Liban dans
les circonstances présentes. Il y a lieu de signaler que la Banque
islamique pour le développement prévoit une assistance financière
substantielle dont a été notifié le chef du gouvernement.
En ce qui concerne le déploiement des Casques Bleus dans la région
frontalière, il fait l’objet de consultations entre les Nations
Unies et les responsables libanais. A cet effet, M. Kofi Annan a contacté,
téléphoniquement, le président Lahoud, à propos
du nouveau rapport qui devra être présenté à
la fin de cette semaine au Conseil de Sécurité, sur la base
des renseignements qui lui auront été communiqués
par M. Larsen.
Il va sans dire que les citoyens attendent, non sans impatience, le
déploiement de l’Armée, bien que les FSI aient dressé
un barrage fixe à Nakoura, pour interdire le déplacement
vers la zone frontalière de toute personne, hormis les habitants
des villages sudistes, afin de prévenir tout débordement.
Pendant ce temps, le président Hoss et Mme Randa Berri sont
revenus au Sud, à l’effet de rassurer les habitants, en promettant
le renforcement des forces légales dans un délai relativement
court. D’ailleurs, au cours du meeting monstre de Nabatieh, cheikh Hassan
Nasrallah, secrétaire général du “Hezbollah”, a dissipé
les appréhensions, en affirmant que son parti “n’avait nullement
l’intention de se substituer à l’Etat au plan de la sécurité”
et se souciait, au contraire, “de préserver, en la consolidant,
l’unité nationale”.