Le président Emile Lahoud entouré de
M. Melhem Karam et du conseil de l’Ordre des journalistes.
Nous avons pu obtenir notre droit par les actes et non par les “forfanteries”,
les canons et les jacasseries. Le Liban, ce petit pays, a maintenant un
grand rôle grâce à sa contexture confessionnelle et
à son ouverture sur toutes les civilisations et les cultures. Ceci
lui a fait acquérir une position privilégiée et son
attachement à la stricte application de la résolution 425
du Conseil de Sécurité lui a valu un surcroît de respect
de la part de la communauté internationale, a déclaré
le président Lahoud en recevant, mercredi, le conseil de l’Ordre
des journalistes dirigé par M. Melhem Karam.
Il a rappelé son premier mémorandum adressé au
secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan,
relatif au retrait israélien.
Certains, dit-il, l’ont considéré comme un document rédhibitoire
ayant pour but d’entraver le retrait. Mais il est apparu, par la suite,
que nous avions raison. Par ce moyen, nous avons contraint Israël
à se retirer. Dans l’après-midi d’hier (mardi), M. Annan
m’a contacté pour reconnaître les violations israéliennes,
en promettant d’y mettre fin en trois jours. J’ai attiré son attention
sur le fait que l’Etat hébreu a pris l’habitude de tergiverser et
il m’a répondu que les Nations Unies utiliseront des radars pour
s’assurer de toute violation aérienne. De même, elles disposeront
d’hélicoptères pour détecter toute violation dans
les eaux régionales.
Le président de la République a refusé d’établir
un parallèle entre la situation au Liban et au Kosovo, parce qu’Israël
est l’agresseur. Pour réaliser la paix globale et juste, il faut
réclamer le droit de retour aux réfugiés. Est-il logique
que des camps soient bondés d’armes lourdes et des réfugiés
armés en même temps? Ceux-ci doivent réintégrer
leur terre et leur droit au retour est sacré. Israël a appliqué
la résolution 425, parce qu’il était gêné et
il appliquera, tôt ou tard, la résolution 242, car il n’y
a pas de paix sans cela et il n’a d’autre intérêt que de l’appliquer,
faute de quoi il en paiera très cher le prix.
ÉDIFIONS L’ÉTAT DE LA LOI
Puis, le président Lahoud a parlé de l’étape d’après
la paix, si celle-ci venait à être instaurée: Il nous
faut être prêts et ceci exige l’édification de l’Etat
de la loi et qu’il soit mis fin à la logique des quotes-parts. Nous
approchons des élections générales et soyez certains
- vous le toucherez vous-mêmes du doigt - qu’il n’y aura aucune fraude,
ni falsification. Dans la même mesure où nous avons œuvré
en vue de récupérer nos droits, nous organiserons une consultation
populaire honnête, dont le Liban n’aura pas honte. D’où notre
insistance à adopter la carte électorale pour assurer la
régularité du scrutin.
Le président Lahoud admet que la situation économique
est difficile. Quiconque ne se préoccupe que d’assurer la subsistance
à sa famille, n’attache aucune importance aux questions politiques
et à la conjoncture régionale.
S’interdisant de blâmer telle partie ou telle autre, le chef
de l’Etat ajoute: Nous sommes arrivés à ce stade, à
cause de la guerre dont nous pâtissons des séquelles depuis
1975. Les problèmes se compliquent avec le temps, d’autant que les
intérêts de la dette s’accroissent. Une seule solution doit
être retenue pour mettre un terme à cette situation: l’édification
de l’Etat de la loi, en mettant fin au gaspillage.
Le président Lahoud a, enfin, réaffirmé son souci
de faire de Beyrouth la capitale du Proche-Orient, capable d’attirer les
investissements, disant que la paix juste et globale favorise ces investissements
et incitera la diaspora, sur laquelle nous parions, à investir une
partie de ses richesses évaluées à des milliards de
dollars.
KARAM: PAS DE RENONCIATION AU MOINDRE POUCE
DE LA TERRE
Au préalable, M. Melhem Karam avait pris la parole pour féliciter
les Libanais, parce que vous avez refusé, M. le Président,
de céder le moindre pouce du territoire national, en tenant aux
frontières de Fakhreddine. On faisait état, précédemment,
d’une ligne rouge et on parle, à présent, d’une ligne bleue,
celle qui délimite les frontières de la patrie et n’est sujette
à aucune contestation. Ce sont les frontières définies
en 1923 en vertu de l’accord Pollet-Newcombe qui a été confirmé
en 1949 par la convention mixte d’armistice; puis, en 1978, le jour où
Israël a occupé pendant un certain temps des portions du Liban-Sud.
L’important, poursuit M. Karam, est que l’Etat impose sa présence.
Il importe, également, aux gens de jouir de la liberté et
de la démocratie aux prochaines législatives, celles-ci devant
garantir leur droit à choisir leurs représentants et votre
Excellence, en êtes le garant. L’instruction, la santé, les
garanties sociales et les besoins des Libanais font partie de vos soucis
quotidiens et nous avons connaissance de ce que vous êtes déterminé
à entreprendre dans ce domaine.
QUESTIONS ET RÉPONSES
Puis, le président Lahoud a répondu aux questions qui
lui ont été posées.
A propos de l’octroi aux Libanais d’outre-mer de la nationalité
qui leur ferait bénéficier de tous les droits, “hormis celui
du vote”, le président Lahoud justifie cette décision par
le fait que cela provoquerait un déséquilibre au double plan
communautaire et démographique.
De l’avenir des relations libano-syriennes, il a assuré que
le Dr Bachar Assad est attaché aux principes et valeurs prônés
par l’école de son père, surtout en ce qui concerne le soutien
à apporter au Liban, à la coordination et à la coopération
parfaites entre les deux pays. Ses visions sont pareilles aux nôtres,
en ce qui concerne l’ouverture, l’exploitation dans le domaine de la technologie
évoluée et l’édification de l’Etat de la loi et des
institutions. Ceci aura pour conséquence de consolider davantage
nos relations qui sont de caractère institutionnel non liées
à une partie aux dépens de l’autre.
De l’insistance, par certains, à réclamer le déploiement
de l’Armée dans les régions libérées, le chef
de l’Etat dit que l’institution militaire est consciente de son devoir
et de ses obligations. Laissons-lui toute latitude de prendre les décisions
qu’elle juge nécessaires.
Du problème des personnes déplacées, le président
Lahoud a dit qu’il en avait discuté récemment avec M. Walid
Joumblatt et pense que le retrait israélien du Sud hâtera
le règlement de ce dossier.
Du cas de la Middle-East Airlines et d’autres compagnies appelées
à être privatisées, il précise que des institutions
internationales spécialisées ont été chargées
d’en étudier le dossier et une décision finale sera prise
sur base des rapports qu’ils présenteront au gouvernement.