LE CHANGEMENT POSITIF
EFFICACE, SUJET DE FIERTÉ ET NON DE PLAINTE
Certaines
choses... les choses de la paix, après le congrès du “Baas”,
la candidature électorale et la présidence... Ce sont les
affaires syriennes, celles de l’intérieur qui restent aux Syriens.
Etant entendu et les Syriens en ont conscience, que le monde est devenu
sans frontières. C’est pourquoi, peut-être, l’attachement
aux frontières nationales dans les Etats d’Europe, serait-ce à
travers des propos autour d’un fédéralisme perplexe entre
le fédéralisme de Charles de Gaulle et le fédéralisme
de Jean Monnet. Surtout que la logique gaulliste appréhendait un
fédéralisme unifié, ce dernier supposant un même
gouverneur fédéré. Il a craint que l’Europe ne soit
pas unifiée et a, alors, imaginé le “nouveau monde” régnant,
fédéralement, sur l’“ancien monde”... Une fédération
suppose un fédérateur.
Certaines choses de la paix après ce qui
s’est passé en Syrie, changeront. Les choses et les gens. Car le
jeu de la modernisation suppose cela. Et l’impose. Edouard Honein, secrétaire
général du “Front libanais” a démissionné du
secrétariat, le jour où Camille Chamoun et Pierre Gemayel
ont disparu. C’est une question très naturelle. L’ancienne garde
cède la place à la nouvelle garde. Les compagnons de Mendès-France
n’ont pas été les mêmes que ceux d’Edouard Herriot
au sein du parti radical en France. Pourtant, Mendès-France avait
pris la relève de la main de Herriot; de sa propre main.
Bien des choses changeront. Cependant, la vision
par rapport aux questions fondamentales resteront. Telle la vision relative
à la récupération du Golan en tant que terre occupée,
bien qu’Israël y voit une question d’eau et de colons. Il est vrai
que le Golan est la source des affluents orientaux du lac de Tibériade
et du fleuve du Jourdain, fournissant à l’Etat hébreu trois
cent millions de mètres cubes d’eau. Mais le Golan est une terre
syrienne. Depuis l’occupation arabe, jusqu’aux accords de Sykes Picot qui
l’ont reconnu en 1916 en tant que partie intégrante de la terre
syrienne.
Depuis les temps les plus reculés, la
route des caravanes allaient de Damas à Bagdad. Les Grecs l’ont
occupée. Et les Romains, aussi, dont les gouverneurs se sont établis
à Kuneitra qui est revenu à la Syrie le 21 mai 1974, date
du désengagement entre la Syrie et Israël. Les négociations
prises en charge par Henri Kissinger, ont restitué à la Syrie
une partie du Golan, dont Kuneitra. L’histoire du Golan est l’histoire
de constantes syriennes, en dépit des paroles sur la souplesse et
l’ouverture, parce que la souplesse et l’ouverture ne peuvent s’inscrire
sous le titre de l’acceptation de la paix des braves.
Bien des choses changeront. Les choses libanaises.
Les visages et le procédé. Le procédé dans
le traitement et le comportement. Les figures qui inspirent confiance aux
Libanais et aux Syriens. La confiance de la franchise et la confiance en
ce qu’on doit éliminer les négativismes avec les positivismes.
Ce n’est pas peu de chose que la Syrie soit au Liban depuis 1976. Octobre
1976. Et le Liban est difficile à gérer dans les deux cas:
l’état d’acceptation et l’état de refus. Soyons francs: il
y a eu des erreurs et des négativismes du côté syrien.
Parce que les erreurs et les négativismes sont des éléments
constitutifs de l’entité humaine.
Ils comportent le facteur de l’humeur comme celui
de la lecture réaliste. Parfois, l’humeur l’emporte sur le réalisme
dans la relation des gens. Le Libanais ressent tout cela, parce qu’il s’est
expatrié plus que les autres. L’émigration et la résidence
temporaire signifient la rencontre des gens, ceux des pays d’accueil, ce
qui ouvre la porte à la préférence. Celle-ci se manifeste
dans l’état d’âme individuel et collectif, sous forme de tendance
vers un parti déterminé dans un Etat et vers un style de
pouvoir. La tendance vers un parti atteint, parfois, l’affiliation à
ce parti. Bien que le résident provisoire n’ait droit qu’à
des propos éphémères à une table dans un café-trottoir.
Dans ce contexte, est-il possible qu’une préférence n’ait
pas eu lieu entre des Libanais et des Syriens? Disons plus: nous sommes
tous pour la souveraineté et l’indépendance. Mais l’ingérence
syrienne dans les affaires libanaises, les affaires intérieures,
individuelles le plus souvent, s’est-elle produite sans un consentement
libanais? Il est de notoriété publique que la Syrie se soucie
de sa sécurité comme tous les Etats... Et se soucie, dans
le même temps de ce que le Liban ne soit pas un endroit à
partir duquel cette sécurité serait perturbée.
On sait, aussi, que la concomitance des deux
volets est un fait important sur la voie de la paix. Cependant, ce qui
n’est pas compris, c’est l’ingérence syrienne dans les petites affaires
quotidiennes sans une demande libanaise. Et pourquoi ne mentionnerions-nous
pas ce qui se produisait du temps des Palestiniens? Les Palestiniens qui
imposaient leur loi dans le secteur ouest de Beyrouth... et du Liban. Le
jour où Abou-Ammar invitait ses grands hôtes à le rencontrer
dans la capitale libanaise à travers l’aéroport libanais?
Mieux encore. Pourquoi ne pas évoquer
ce que disait une femme libanaise à sa voisine quand elle était
gênée par la mauvaise conduite de son fils: Je lui enverrai
un Palestinien pour lui administrer une correction... et ce Palestinien
se réfugiait dans les camps!
L’erreur est commune; nous devons l’avouer. La
cause de cela, réside en ce que, face à la Syrie, les Libanais,
surtout les chrétiens, sont de deux catégories: des gens
qui à, partir de leurs maisons, disent leur mécontentement.
Et des gens se rendant en Syrie pour admettre et acquiescer. Les deux Libanais
ne sont pas acceptables. Ayons le courage de dire la vérité
et de reconnaître le droit. Le courage des hommes qui se font face
et discutent d’égal à égal; se mettent d’accord ou
en désaccord; échangent le sourire ou froncent les sourcils,
tout en continuant à s’entretenir jusqu’à parvenir à
un horizon de pensée et à une règle de travail.
Bien des choses changeront en Syrie. Mais la
chose sûre est que Hafez Assad, qu’ils l’aiment ou pas, - bien qu’il
mérite toute appréciation et affection - reste la ligne à
suivre. Et, partant, la chose stable est que Bachar Assad, ce médecin
ophtalmologue spécialiste dans la vision politique jeune de longue
portée, aspire à la prestance dont jouissait son père.
Nous disons cela. Peu nous importe que l’exagération nous soit attribuée.
Et peut-être autres choses.
Il importe que le Libanais soit libanais et
traite avec les Syriens; qu’il reste souverain, indépendant, accepte
l’unité des deux volets et soit l’homme de l’option arabe. L’option
se paralyse, si elle est entre l’Arabe et l’Israélien. L’important,
c’est nous, notre parole, notre comportement, notre façon de prendre
et de donner.
Bien des choses changeront... et nous autres
dans cet Orient, sommes sur le seuil du changement, le changement demandé
étant la question de base. La question de la confiance, si la confiance
est établie entre le Palestinien et l’Israélien... Combien
ces paroles sont-elles anciennes!! Lorsque Yasser Arafat et Ehud Bark décidaient
de se rencontrer, le jour où le processus de paix avec la Syrie
trébuchait par une action israélienne. Et quand le chef du
gouvernement de l’Etat hébreu portait un gant de velours pour cacher
la main de fer et exigeait des concessions que n’accepte pas le plus souple
et le plus accommodant des négociateurs palestiniens.
Bien des choses changeront en France... Le mandat
du chef de l’Etat sera de cinq ans. Depuis vingt-sept ans, cela devait
se produire. Georges Pompidou a essayé et échoué.
Il a essayé, parce qu’il a vu, nous le disons une fois encore, que
la présidence de la Vème République était à
la mesure du fondateur de cette République, qui n’acceptait pas
un Pouvoir ne bénéficiant pas de la majorité de soixante-dix
ou quatre-vingt pour cent, comme il le répétait toujours
et ainsi que le rapportaient Michel Debré et Alain Peyrefitte. Après
lui, aucun président n’a tenté de discuter de la durée
du mandat présidentiel, ni Valéry Giscard d’Estaing, ni François
Mitterrand, bien que Mitterrand avait inscrit le quinquennat à son
programme jusqu’à ce qu’il devint président. Au temps de
Jacques Chirac, le quinquennat s’est réalisé. Dans l’esprit
de compenser par le quinquennat, après 2002, la solution prématurée
d’une Assemblée nationale dont les élections lui ont amené
une majorité socialiste.
Bien des choses changeront, jusqu’à la
dissuasion nucléaire à laquelle œuvre l’Amérique,
parce l’Amérique commence à avoir peur des petits. Depuis
longtemps, une telle logique a émergé du temps de la guerre
froide, après que l’arme nucléaire a commencé à
être détenue par bien des Etats affranchis de contrôle
et de surveillance. L’Amérique a peur d’un coup nucléaire
qui lui viendrait du côté des “Etats voyous”, comme elle les
appelle. C’est pourquoi, elle se soucie de s’entendre avec la Russie, en
vue de l’établissement d’une arme capable de contrer les missiles
nucléaires. Comment l’acteur devient victime de son action!
Chez nous, qu’est-ce qui changera? Ce qui
a changé, c’est beaucoup de choses. Le Sud est devenu libre après
vingt-trois ans. Mais la libération est une opération permanente.
C’est ainsi qu’elle doit être.
Dormir sur l’éclat de la libération
est une erreur. Vous souvenez-vous de Cana... l’esprit de Cana? Elle serait
tombée dans l’oubli, si la libération ne l’avait pas vengée.
La libération ne sera jamais repos, calme et joie dans la brillance
qui pourrait se dissiper, si nous ne l’entretenons pas, en faisant d’elle
une vérité qui vit et s’alimente par l’esprit de la responsabilité
capable de lire un état sudiste, dont nous devons faire un sujet
de fierté et non de plainte. |
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