BACHAR PLÉBISCITÉ PAR UN RÉFÉRENDUM POPULAIRE
LE COURONNEMENT DU PROCESSUS DE SUCCESSION

Les Syriens ont participé en masse au référendum du 10 juillet 2000 pour dire “oui” à Bachar Assad, unique candidat à la succession de son père. Le vote était, surtout, symbolique puisque le “dauphin” avait été plébiscité par le peuple le jour même des funérailles de Hafez Assad. Sur les 9 millions de Syriens appelés au vote, 97,29% ont dit oui à Bachar Assad qui devient le 16ème président de la République arabe syrienne pour un mandat de sept ans. De nombreux défis l’attendent.
 
Les Syriens en liesse à Damas pour 
fêter leur nouveau président.

Depuis la mort du président Hafez Assad le 10 juin, son fils cadet et dauphin Bachar a franchi, en l’espace d’un mois, comme une lettre à la poste, toutes les étapes vers la magistrature suprême, tel que l’avait voulu et programmé feu son père, sentant sa fin prochaine. Aucune ombre au tableau et les invectives de Rifaat Assad sur la chaîne de télévision ANN que dirige son fils, ne semblent inquiéter personne. Pour l’heure du moins.
Promu général, le Dr Bachar est désigné commandant en chef des forces armées; puis, secrétaire général du Baas, parti au Pouvoir depuis 1963.
Le Conseil du Peuple (parlement) approuvait par la suite, à l’unanimité, la candidature du jeune ophtalmologue de 34 ans à la présidence de la République.
Le référendum du 10 juillet est venu tout naturellement “couronner” cette procédure sans faille. D’ailleurs, le peuple avait, spontanément, plébiscité le “dauphin” le jour même des funérailles de Hafez Assad qui a “régné” sur la Syrie durant trente ans.
Pour cela, la presse occidentale a qualifié le référendum du 10 juillet “d’intronisation”.

ABSENCE D’ISOLOIR ET VOTE SYMBOLIQUE
Les Syriens sont venus par millions cocher le “oui”, à découvert - les isoloirs étant inexistants - sur le bulletin de référendum et certains ont tenu à le marquer de leur sang. Ouverts dès sept heures du matin, les bureaux de vote n’ont pas désempli de la journée et leur ouverture fut prolongée jusqu’à 22 heures.
Autour de dix heures, Bachar Assad est arrivé au volant de sa Mercedes devant l’école Bassel Assad pour y déposer son bulletin. Il affirme avoir choisi, volontairement, ce bureau de vote, car c’est en cette école dépendant autrefois du Lycée français, qu’il a fait ses études primaires et secondaires. Accueilli par le ministre de l’Information, acclamé par la foule, il remercie les enseignants de l’établissement scolaire leur disant: “J’ai grandi et étudié dans cette école et je suis venu lui témoigner ma reconnaissance. La réussite tout comme l’échec dans la vie proviennent de deux sources: l’école et la famille. Je vous suis redevable de cet appui et de cette affection que le peuple me témoigne”.
Tous les hauts responsables du pays ont de même fait des déclarations en déposant leur bulletin. Pour le Premier ministre, Moustapha Miro, “cette journée a plusieurs significations. Sur le plan politique, elle confirme l’unité nationale et l’attachement à son nouveau leader, aux directives et principes du grand disparu, Hafez Assad”.
M. Farouk Chareh, ministre des Affaires étrangères, devait réaffirmer “l’engagement de la Syrie dans le processus de paix, selon les principes établis à Madrid. Damas, dit-il, est décidée à aller de l’avant, conformément aux résolutions de l’ONU. Le “oui” à Bachar est un choix national visant à libérer la terre et à recouvrer tous nos droits”.
 

Le dépouillement des votes.
Les parlementaires syriens acclament 
le nouveau président.

AU LIBAN, EN L’ABSENCE D’UNE CHANCELLERIE
Au Liban, plusieurs bureaux de vote avaient été installés à Beyrouth et dans les mohafazats pour permettre au million de travailleurs syriens résidant au pays des Cèdres de remplir leur devoir national. Cette mesure a suscité des réactions de la part de certains partis politiques libanais, dont le Parti national libéral et les Forces Libanaises dissoutes.
Il faut dire que, dans les autres pays, les Syriens ont déposé leur bulletin dans les représentations diplomatiques de leur pays. L’absence d’échange diplomatique entre le Liban et la Syrie, est une faille qu’on ne peut que déplorer une fois de plus et réclamer qu’elle soit comblée au plus vite, afin de normaliser la situation entre les deux pays.
Un fait encore plus incompréhensible: les visites rendues par de nombreux leaders politiques libanais à ces bureaux de vote. Ils sont venus obtenir la bénédiction de Damas pour les législatives. Peut-on à ce point perdre le sens de toute dignité nationale?
Dès la fermeture des bureaux de vote à 22 heures, le dépouillement des bulletins a commencé sur-le-champ. Le mardi 11 juillet en fin de matinée, M. Mohamed Harba, ministre de l’Intérieur, proclamait les résultats officiels: la participation au référendum a été de 94,59%, le oui ayant obtenu 97,29%.
Les résultats étaient, ensuite, transmis au Conseil du Peuple qui s’est réuni le jour même à 18 heures pour les entériner. M. Abdel-Kader Kaddoura, chef du parlement, proclamait officiellement Bachar Assad président de la République syrienne. D’un seul élan, les parlementaires l’ont longuement ovationné, debout, certains scandant: “Par notre âme, par notre sang, nous nous sacrifierons pour toi, ô Bachar”.
Le 17 juillet, Bachar Assad prêtera le serment constitutionnel.


Chareh: “Le “oui” à Bachar est un choix national
visant à libérer la terre et à recouvrer tous nos droits.”


Les résultats:
9.442.054 citoyens étaient appelés à ce référendum.
8.931.623, y ont participé, soit 94,59%.
8.689.871 ont dit “oui”, soit 97,29%.
22.439 ont dit “non”, soit 2,51 pour 1000.
219.313 bulletins ont été déclarés nuls.
***
Rien ne prédestinait ce médecin ophtalmologue de 34 ans à diriger la Syrie. La mort de son frère aîné, Bassel en 1994, l’oblige à interrompre sa spécialisation à Londres et à rentrer au pays. Il devient le “dauphin” et entame son apprentissage politique. Aujourd’hui, devenu le 16ème président de la République arabe syrienne, de nombreux défis l’attendent.
Sur le plan interne: préserver l’unité des rangs et moderniser le pays. Mettre fin à la lourdeur bureaucratique, lutter contre la corruption, s’orienter vers le secteur privé, afin de donner du tonus à la vie économique du pays.
Sur le plan externe: deux dossiers majeurs: 
1- Le processus de paix. Même si le nouvel élu reprend pour l’heure les thèses de son père, il n’est pas prisonnier de ces options, tel que l’était devenu Hafez Assad qui ne pouvait entacher son crédit dans son pays et le monde arabe en faisant des concessions.
2- Les relations avec le Liban. Bachar Assad sera-t-il prêt à accepter la thèse des Libanais qui sont pour les relations privilégiées entre les deux pays mais dans le cadre du respect de la souveraineté nationale et des spécificités de chacune des deux nations?
Puis, qu’en est-il du retrait des troupes syriennes du Liban? 

NELLY HELOU

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