APRÈS LE SCRUTIN, LA BATAILLE POUR LA TROISIÈME PRÉSIDENCE

Au fur et à mesure qu’approche la date du scrutin, la fièvre monte et les candidats en lice échangent les invectives faisant monter la tension et échauffant l’atmosphère.
Les médias se mettent de la partie, alors que la nouvelle loi électorale et celle réglementant l’information audiovisuelle, ainsi que l’arrêté du ministre de l’Intérieur convoquant les collèges électoraux, interdisent aux moyens d’information apolitiques de se prêter à toute campagne publicitaire de caractère politique sous peine de sanctions.

De plus, les médias sont mis en garde contre toute tentative de susciter des zizanies d’ordre confessionnel ou sectaire. Aussi, le Conseil national de l’Information a-t-il adressé au Conseil des ministres, par le canal du ministère de l’Information, une lettre par laquelle il attire l’attention sur les infractions que les médias seraient portés à commettre aux dispositions de la loi en vigueur, ce qui affecterait l’opération électorale et nécessiterait des poursuites judiciaires à l’encontre des contrevenants.
Cela dit, les listes ont été proclamées dans les circonscriptions du Mont-Liban et du Liban-Nord. Ainsi, M. Michel Murr, ministre de l’Intérieur, a présenté ses colistiers à partir de sa résidence de Bteghrine, alors que M. Nassib Lahoud devait annoncer sa liste vingt-quatre heures plus tard. Le Dr Albert Moukheiber fait cavalier seul, ayant pour unique colistier Me Hanna Chidiac, alors que la liste Murr laisse vacante la place du candidat grec-orthodoxe sans doute pour en faire bénéficier le Dr Moukheiber.
M. Murr a révélé un pacte d’alliance avec le Tachnag, au cours d’une rencontre avec le Comité exécutif de ce parti à Bourj Hammoud. A cette occasion, MM. Murr et Bouchakjian, secrétaire général du parti, ont échangé des allocutions de circonstance, en attirant l’attention sur le fait que “cette alliance n’est pas d’aujourd’hui, mais remonte à une quarantaine d’années”.

LIBAN-SUD: DES DIZAINES DE CANDIDATS POUR 23 SIÈGES
La bataille commence à s’animer au Liban-Sud où le scrutin est fixé au 3 septembre. D’ores et déjà, des dizaines de candidats s’affrontent pour vingt-trois sièges.
On s’attend que le président Berri annonce la liste de la Résistance et du Développement le 22 août (date de la disparition de l’imam Moussa Sadr), au cours d’un meeting de “Amal”. Cette liste est complète, sauf qu’il y manque encore les candidats (maronite et melkite) de Jezzine. Cette liste, rappelons-le, concrétise l’alliance conclue entre “Amal” et le “Hezbollah” et rend difficile la mise sur pied d’une liste concurrente complète.
A Saïda, l’atmosphère s’échauffe bien que, pour la première fois, M. Moustapha Saad fasse partie d’une même liste avec Mme Bahia Hariri.
Au siège de l’Ordre des journalistes, M. Elias Abou-Rizk, président de la CGTL, a annoncé sa candidature au Sud où il avait réalisé, en 1996, un score honorable.
M. Abou-Rizk a refusé de se présenter à Beyrouth - à la place de M. Najah Wakim qui a décidé de se retirer - et celui-ci a exposé au chef de l’Etat au début de la semaine, les raisons qui l’ont amené à prendre une telle décision.
Au cours d’une interview, M. Wakim nous a assuré qu’il ne quittera pas la scène mais, au contraire, œuvrera de concert avec le “Mouvement du peuple” dont il se réclame, pour modifier le système politique, après avoir désespéré d’y parvenir de l’intérieur du parlement. “La grande bataille, soutient-il, est dans la rue, car nous n’avons plus une `Chambre de députés digne de ce nom. Comment pourrais-je encore en faire partie et y siéger?”

LE “CAS WAKIM”
A la question:  “Votre décision est-elle définitive?”, M. Wakim répond: “Je pourrais la reconsidérer, si certaines conditions étaient satisfaites, dont la renonciation à la formation de “listes préfabriquées”... Le pays a besoin d’une solution drastique pour sortir de cette situation si peu enviable dans laquelle il se débat”.
De plus, le député de Beyrouth préconise le report des législatives jusqu’au 3 octobre, la présente législature venant à expiration le quinze de ce mois. “Entre-temps, observe-t-il, il serait possible de réviser la loi électorale pour permettre d’apporter du sang nouveau à l’Assemblée nationale.
En avez-vous parlé avec le président de la République?
Notre entretien a porté sur la situation dans son ensemble partant du fait que le pays étouffe et a un besoin urgent d’air frais. Je lui ai exposé mon point de vue, quant à la manière de remédier à la situation. J’estime que les élections générales, dans les conditions conformément auxquelles elles sont organisées, constituent un réel danger pour le Liban. Je demande que des mesures soient prises sans retard, afin de raviver l’action politique qui est actuellement enterrée sous l’hémicycle.
Il est pratiquement impossible de reporter les législatives. Auriez-vous une solution plus valable?
Il est possible de convoquer l’Assemblée en session extraordinaire pour statuer sur les moyens de sortir le pays de l’ornière...
M. Wakim préconise la réduction à dix-huit ans de l’âge du vote, afin de permettre l’accès au parlement d’une dizaine de parlementaires au moins.

DE BAALBECK-HERMEL, AU CHOUF ET À TRIPOLI
A Baalbeck-Hermel, le président Hussein Husseini a annoncé la constitution de sa liste qui comprend le ministre de la Défense, M. Ghazi Zéaiter, trois députés: MM. Assem Kanso, Hussein el-Hajj Hassan et Ibrahim Bayane; Mohamed Yaghi, ancien parlementaire, Massoud Al-Houjairi et Nader Souccar.
MM. Rached Sabri Hamadé et Rifaat Nayef Masri tentent de former une liste avec d’autres colistiers qui restent à choisir.
Au Chouf, M. Naji Boustany a mis sur pied une liste (concurrente à celle de M. Walid Joumblatt) dont fait partie M. Zaher el-Khatib, après que celui-ci eut été exclu de la liste joumblattiste.
Par la même occasion et au cours d’un déjeuner offert par cheikh Ali Zeineddine, président de la société “Al-Ourfane” en l’honneur du président Rafic Hariri, M. Joumblatt en a profité pour réitérer son appui à l’ancien chef du gouvernement en tant que futur Premier ministre.
A Tripoli, le président Omar Karamé et Nayla Mouawad - qui font tandem contre MM. Sleiman Frangié et Najib Mikati - la “Jamaa Islamiya” a créé un problème en décidant de renoncer à son alliance avec le leader tripolitain, un différend ayant été provoqué par le choix de certains candidats chrétiens, notamment ceux de Batroun et de Koura proches des F.L.
Le groupe islamiste a voulu restreindre son alliance avec le président Karamé aux seuls cazas de Tripoli et de Minieh. On présume que la “Jamaa” a préféré faire partie de la liste Frangié-Mikati, après que M. Misbah el-Ahdab en fut exclu.
Celui-ci a annoncé qu’il persistait dans la bataille et se présentait à titre individuel, alors que M. Omar Meskaoui a formé une liste incomplète.

RÉTRACTATION AU KESROUAN
Au Kesrouan, comme à Tripoli, la rétractation de M. Youssef Khalil, colistier de M. Farès Bouez, a créé la surprise, celui-ci ayant justifié sa décision par des considérations “d’ordre technique”.
Cela dit et en dépit du scepticisme de bien des milieux qui ne s’attendent pas à un changement notable dans la prochaine législature, certains observateurs pensent que la future Chambre des députés comptera beaucoup de nouveaux visages.
De toute manière, après les législatives, une bataille non moins féroce sera engagée, celle qui aura pour enjeu le choix du nouveau Premier ministre. Parmi les “présidentiables” les plus souvent cités; les présidents Hoss, Hariri et M. Najib Mikati, ministre des Travaux publics et des Transports.
Il va sans dire que les résultats du scrutin au Mont-Liban et au Liban-Nord, permettront d’ores et déjà, de se faire une idée de la configuration de la prochaine Assemblée et de jauger du poids des forces en présence.
Enfin, il y a lieu de faire état de la visite que M. Walid Joumblatt a faite au président Amine Gemayel, en la résidence de l’ancien chef de l’Etat à Bickfaya, mettant fin à une hostilité qui opposait les deux hommes. En effet, le leader du PSP a déclaré que cette rencontre “tournait la page du passé en ouvrant la voie à des relations normales et naturelles entre les deux parties dans le domaine politique”.

NADIM EL-HACHEM

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