![]() Clinton s’adressant à la Convention démocrate. |
![]() Le ticket Gore-Lieberman veut se présenter comme l’incarnation de l’“American dream team”. |
Incontestablement, le charismatique Bill Clinton fait de l’ombre à
son pâle vice-président Al Gore qui, fort paradoxalement,
s’investit pleinement dans les huit années de prospérité
sans précédent que connaît l’Amérique depuis
huit ans et veut en même temps se dissocier des scandales qui ont
entaché le passage de son maître à la Maison-Blanche.
Mais allant au-devant des objections et faisant fi des calculs mesquins
de son dauphin, le président a souligné, dans son discours
d’adieu à l’ouverture de la Convention (14-17 août), que “
nous avons travaillé ensemble depuis bientôt huit ans. Dans
les jours les plus durs de ces dernières années où
nous avons affronté les échéances les plus cruciales
de la guerre et de la paix et servi les priorités de notre pays,
il était toujours là”. Il poursuivra notre prospérité
et préservera “toutes les décisions-clés de notre
administration”.
Ayant étudié le discours de Ronald Reagan à la
Convention républicaine de 1988, à l’issue de ses deux mandats,
Clinton, dans son quatrième discours à une Convention, a
précisé qu’“aucune de nos réalisations n’a été
le résultat d’un accident” et que “le succès de l’Amérique
n’a pas été le facteur de la chance, mais bien la conséquence
d’un choix”. Les résultats concrets de cette prospérité:
22 millions de nouveaux emplois, le plus bas taux de chômage depuis
trente ans, etc... “Nous sommes passés des plus larges déficits
aux plus larges surplus (budgétaires) dans l’Histoire”. Mais il
y a bien plus que cela. “Notre progrès dépasse de loin l’économie.
L’Amérique est plus confiante, plus juste, plus sécurisée
et libre, car nous avons offert une vision et nous y avons travaillé
ensemble”. Reprenant le slogan de sa campagne électorale de 1996,
le chef de la Maison-Blanche qui n’a pas manqué de critiquer les
Républicains et leur candidat George W. Bush, a confié à
un auditoire surchauffé, provoquant des tonnerres d’applaudissements:
“Ce soir, nous pouvons dire avec confiance: nous avons construit notre
pont vers le XXIème siècle. Nous l’avons traversé
ensemble. Et nous n’allons plus reculer”.
![]() A la Convention, image d’une famille unie: Chelsea, Bill et Hillary Clinton. |
![]() L’ex-président Jimmy Carter et son épouse Rosalyn présents à la Convention. |
Votez donc pour Al Gore-Joe Lieberman, “ils poursuivront notre prospérité,
en réduisant notre dette, investissant dans l’éducation,
la santé, la réduction des taxes familiales à la différence
du GOP qui veut dépenser chaque dime (un 10ème de dollar)
de notre surplus escompté”. C’est tout le programme de la Convention
penchée sur “la prospérité, le progrès, la
paix”. Et dans une nouvelle envolée, le chef de l’Etat américain
a confié que “plus que quiconque, j’ai connu Al Gore dans sa vie
publique. C’est un homme qui comprend le futur”.
Bill Clinton a inscrit son discours, suivi de Hillary à la tribune,
en tête d’affiche avant de quitter la convention pour éviter
de voler indéfiniment la vedette à Al Gore qui sera intronisé
le jeudi 17 août (et introduit par Tipper son épouse), après
avoir reçu l’investiture des délégués à
la Convention et qui délivrera à son tour un discours-programme.
Auparavant, la grand-messe démocrate sera animée par une
succession d’orateurs: le sénateur Ted Kennedy, Bill Bradley, le
révérend Jesse Jackson, Caroline Kennedy-Schlossberg, Karenna
Gore-Schift, un bouquet de vedettes dont Barbra Streisand, des concerts,
des forums et aussi des mouvements de contestation qui seront encadrés
de quelque 2.000 policiers. Quarante ans plus tôt, un cérémonial
similaire avait consacré en 1960 John F. Kennedy à Los Angeles.
A la fin de la Convention démocrate qui dispute aux Républicains
le centre de l’échiquier politique que Clinton avait si bien conquis,
le ticket Al Gore-Joe Lieberman pourrait déjà engranger des
bénéfices. Avant de choisir pour colistier, le sénateur
du Connecticut un juif pratiquant qui observe le Shabbat et mange casher,
le vice-président était distancé de 17 points par
le candidat républicain George W. Bush. A l’issue de son choix dûment
réfléchi et sans précédent dans l’histoire
des Etats-Unis, cet écart était réduit à 10
points. A la veille de la Convention, une enquête Reuters/Zogby le
ramenait à trois points. Il était crédité de
40% des intentions de vote contre 43% à son rival républicain.
![]() Curieux chapeau d’une déléguée appuyant Gore. |
![]() Des policiers maîtrisent une contestataire en colère. |
Le vote juif, tout en étant hautement appréciable, ne
serait pratiquement pas déterminant dans les élections du
7 novembre. En fait, les juifs représentent 2% de la population
américaine et quelque 4 millions de suffrages. Ils comptent 34 parlementaires
à la Chambre des représentants et 11 sénateurs sur
100. Traditionnellement et dans leur majorité, ils votent démocrate.
Il n’empêche que le choix de Lieberman a revigoré la campagne
de Gore et augmenté ses chances d’accéder à la Maison-Blanche,
ce dont il a rêvé depuis son jeune âge.
Al Gore, né le 31 mars 1948, avait pris goût à
la politique au contact de son père Albert Gore, sénateur
du Tennessee et s’y était préparé en poursuivant à
l’université de Harvard (où il rencontrera sa future épouse
Tipper, de son vrai nom Mary Elizabeth qui lui donnera un fils et trois
filles) des études de droit et de théologie avec plus tard
pour centres d’intérêt l’environnement et les communications.
En 1977, il a 28 ans quand il est élu député au Tennessee
où il sera réélu à trois reprises avant d’occuper
à 36 ans le poste de sénateur, tremplin à la vice-présidence
en 1992.
De prime abord, l’éclatement du Parti de la réforme,
créé en 1992 par le milliardaire texan Ross Perot, lequel
avait recueilli la même année 20 millions de voix, devrait
profiter à Bush vers lequel reflueraient les voix qui, initialement,
revenaient aux Républicains. Mais il pourrait lui être néfaste
dans certains Etats où la compétition sera féroce
entre les deux candidats. Or, l’écart entre eux s’amenuise et du
coup la campagne s’emballe.