OUI AUX PAROLES
DU REDRESSEMENT. NON AUX PAROLES DE LA COMPLAISANCE!
Qu’est-ce
qui a changé? Rien? L’Histoire du changement est longue et porte
sur son essence. Maintes fois, ils ont essayé de procéder
au changement au Liban, mais aucune fois la tentative n’a réussi.
Nous parlons des élections en regrettant l’élaboration d’une
loi électorale confectionnée à la mesure de ce temps
et combien de fois avons-nous modifié la loi! Sans toucher, naturellement,
à l’intouchable... l’article 95 de la Constitution. Nous avons changé
le nombre des députés, en maintenent, obligatoirement, la
possibilité de le multiplier par onze, parce qu’ainsi a été
l’accord en 1943, et bien avant. Alors qu’en 1927 le sénat a été
dissous une année après sa constitution, les sénateurs
étant devenus députés, le nombre des parlementaires
étant multiplié par dix.
On sait pourquoi cette règle a été
retenue, car sur dix députés, six devaient être chrétiens
et quatre musulmans. En 1943, au temps des présidents qui étaient
à la fois “chef d’Etat, chef du gouvernement”, Maroun Arab est intervenu
au nom du général Spears... ainsi que Nahas pacha... Moustapha
Nahas, leader du “Wafd”, successeur de Saad Zaghloul.
Maroun Arab est intervenu et Nahas pacha aussi.
Un accord libano-libanais a été conclu sous un parrainage
arabo-égyptien et une bénédiction anglaise. Le mot
était, alors, à la couronne britannique, après que
la France eut atteint le stade que l’on sait... et il n’est pas très
vrai que le mandat français a été éliminé
suite à une intervention américano-soviétique, le
nombre des députés fut multiplié par onze: six chrétiens
et cinq musulmans, après que les musulmans eurent demandé
que le nombre soit à égalité, cinq contre cinq, comme
cela s’est produit à Taëf en 1989.
Nous avons modifié le nombre des députés
et le découpage des circonscriptions, une fois en caza et une autre
fois en mohafazat ou entre les deux, une circonscription plus petite que
le mohafazat et plus grande que le caza. A tel point que nous nous souvenions,
des fois de “Pantalon”, personnage connu de la comédie italienne.
Rien n’a changé et rien ne peut changer,
si ce peuple ne change pas. Ce peuple qu’on qualifie, un jour, de grand
et un autre jour d’opiniâtre, alors qu’en vérité, il
n’est ni grand ni opiniâtre. Il est toujours responsable, parce qu’il
cède le leadership, partant du fait que lui n’élit ses députés
que comme les députés élisent le président
de la République, c’est-à-dire qu’ils consacrent à
l’hémicycle un choix établi ailleurs.
Les autres paroles sont pour la diversion. Des
paroles de complaisance et non de redressement, car les paroles de redressement
sont celles de la franchise et de la sincérité, non celles
des promesses destinées à rassurer fictivement. Winston Churchill
a dit aux Anglais des paroles plus importantes en arrivant au pouvoir que
celles qu’il a prononcées en le quittant. “Je ne vous promets pas,
leur dit-il, plus que les souffrances et les larmes”. Ces paroles ont été
dites au temps de la défaite... La défaite de la France et
la constitution du gouvernement de la France libre après l’appel
du 18 juin, De Gaulle, son président et ses membres, résidant
au 10 Downing Street. Les paroles de la victoire, la victoire de la Grande-Bretagne
et la défaite de Churchill, avaient pour préambule les paroles
mêmes de son investiture; et Churchill céda la Grande-Bretagne
à Clement Attlee, dans un état meilleur qu’il l’avait pris
de Neville Chamberlain.
Les paroles de la franchise, de la sincérité
et de l’Histoire, reconnaissant les erreurs et confessant les péchés.
Ces paroles sincères rallient les moyens du redressement et du repentir...
et c’est de cette fusion qu’émane le relèvement du peuple
et qui le remet sur la chaussée de la grandeur.
A ce moment, on réalise clairement que
le fait de s’intéresser aux élections du Mont-Liban n’est
pas motivé par la présence maronite que d’aucuns ont transformée
en ce qu’on a appelé le “maronitisme politique”. Pourtant, le “maronitisme
politique” n’est pas autre chose que le “sunnisme politique”. N’est-ce
pas ce qui s’est passé en 1943? Il ne diffère pas, non plus,
du “chiisme politique” depuis l’imam Moussa Sadr et même avant, bien
qu’on appelait, alors, les chiites “métoualis”. Et l’orthodoxie
politique... Le catholicisme politique et l’Arménisme politique?
Pourquoi le camouflage et pourquoi dire les choses contrairement à
ce qu’elles sont en vérité? Toute communauté est un
parti, comme nous l’avons écrit, parce que les partis ont toujours
manqué de leur essence et d’idéologie, même les partis
qui se sont dotés d’une charte et d’une philosophie. Même
eux n’ont pas été affranchis du “mal libanais”.
Il existe au Liban un mal: la féodalité
et le confessionnalisme. Le mérite d’Alain Peyreffite, le député
gaulliste et le ministre proche du Général, serait-ce à
un degré moindre qu’André Malraux, est d’avoir osé
écrire son ouvrage “Le mal français”, appelant la maladie
par son nom jusqu’à ce que le malade guérisse et recouvre
la vitalité.
Le processus du redressement commence par là
et s’affranchit du caractère circonstanciel. Vladimir Poutine qui
a vu de haut la catastrophe du “Koursk”, n’a pas oublié Boris Eltsine
qui l’a nommé chef du gouvernement en 1999, avant d’être élu
président de la République en mars 2000. Vladimir Poutine
n’a pas oublié Eltsine, ni la Tchétchénie. Pourtant,
tous deux sont changeants. La Tchétchénie qui était
un bourbier pour son prédécesseur, est devenue une grâce
pour lui pour redevenir dans les circonstances actuelles un sujet d’inquiétude.
Le jeu du redressement est un jeu d’authenticité.
Un jeu de commandement, de “charisme”. Ce jeu suppose la franchise, la
sincérité et la souvenance pour oublier, si le souvenir est
hideux, et pour s’en vanter s’il constitue un point d’honneur. Fakhreddine
était un visionnaire, mais sa vision s’est estompée du fait
ottoman négatif. Aussi, a-t-il appelé les maronites à
s’associer à lui dans la gestion de la montagne. Kamal Joumblatt
savait cela, parce qu’il connaissait l’Histoire et en cela il n’était
pas gêné par Lammens, l’historien jésuite belge, qui
a écrit dans un ouvrage traitant des vestiges au Liban, à
propos de cheikh Bachir Joumblatt, qu’il était un chef puissant
mais versatile. Le jour où le Front socialiste national a réussi
aux élections de 1960, Kamal Joumblatt s’est rendu auprès
du président Fouad Chéhab, à la tête d’une délégation
du “front” pour lui remettre le fanion de Fakhreddine. En apprenant cela,
les gens surpris se sont demandé ce que ce joumblattiste était
allé faire chez le Chéhabi avec le drapeau d’Al-Maani! Ceux
qui connaissent l’Histoire ont dissipé la surprise, car ils ont
su que le drapeau a été offert au président à
titre de rappel. Et Kamal Joumblatt ne s’était pas comporté,
ce jour-là, en tant que joumblatti, mais en tant que druze. Il s’est
adressé à Fouad Chéhab en sa qualité de maronite
et non de Chéhabi pour lui dire: Rappelez-vous ce qu’a fait Fakhreddine.
Pour être vraiment valable, le jeu du redressement
doit être à la dimension d’une patrie, d’un Liban ambitieux
et inexpugnable. L’ambition de ceux dont les têtes sont bien posées
sur leurs épaules. L’ambition équilibrée avec les
moyens. Sinon, l’ambition devient une convoitise indomptable. L’ambition
de l’ouragan destructeur qui régresse ensuite, en ayant dans son
essence pharaonique un brin de contrition.
Nicolas II a été canonisé.
Ceci est-il l’un des aspects de la contrition sur ce qui s’est produit
dans la révolution bolchévique? Ovadia Yossef s’est excusé
pour les victimes de l’holocauste, non aux Arabes et l’acte de contrition
n’a pas paru dans la teneur de ses excuses. Bill Clinton a proclamé
sa contrition sur les histoires de la braguette. Personne n’y a cru. Même
Al-Gore s’est dégagé de ses propos dictant qu’il fallait
placer les histoires de l’étourderie dans le sac de l’oubli. Peut-être
que les Américains oublieraient, en cela, le fait pour George Bush
d’avoir prêché la nécessité de ramener l’honnêteté
et la dignité à la Maison-Blanche.
Ceux qui se sont prononcés en faveur de
“Jérusalem” en tant que capitale unique de Palestine... ou une capitale
unifiée éternelle d’Israël, commencent aujourd’hui à
réciter l’acte de contrition. Shlomo Ben Ami s’est prononcé
en faveur de la souveraineté israélienne sur onze des quartiers
juifs de la Ville Sainte. Il l’a dit avec la logique de celui qui accorde
une concession, logique-même de Ehud Barak, le jour où il
a préconisé la “gestion” ou l’“autonomie” sur les petits
faubourgs de Jérusalem comme Aboudis.
Le monde entier a dit autre chose. Yasser Arafat,
revenu de sa tournée fort de la reconnaissance, par l’univers, de
son droit avec l’acquiescement des chrétiens, ne semble plus pouvoir
régresser, bien que les efforts occidentaux, américain, au
départ, se déploient dans le sens peu naïf, appréhendant
le retour de la Knesset en octobre prochain... chose qui bouleverserait
tout le processus de la paix le renvoyant aux calendes israéliennes.
A l’instar du mur des Lamentations, ce qui reste
des deux temples détruits, la mosquée Al-Aqsa, est l’une
des maisons du Prophète arabe. Jérusalem, il est vrai, est
la capitale du monde, de la spiritualité. Mais la souveraineté
humaine sur elle, ne peut être à Dieu, bien qu’Il soit le
Dieu du ciel et de la terre.
Qu’est-ce qui a changé dans tout cela?
Nous en sommes encore face à l’action et à la réaction.
Face à l’athéisme, à la foi et à l’appel à
la réforme. Comme si le monde invite les grands à profiter
des leçons de l’Histoire. L’arme nucléaire était une
force pour l’Union soviétique; elle est devenue un fardeau pour
la Russie. Et la démocratie qui fut, un jour, l’ambition du citoyen,
a été en permanence la hantise du gouvernant. |
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