Adresse du révérend James Forbes au
sommet spirituel du millénaire.
C’est par un sommet d’un millier de chefs spirituels (25-28 août)
que le coup d’envoi de ce vaste rendez-vous planétaire a été
donné. Sous la houlette d’un pacifiste indo-américain, Bawa
Jain, soutenu financièrement par Ted Turner, patron de la CNN, dans
la mise sur pied de ce rassemblement, se sont retrouvés moines,
prêtres, cheikhs, rabbins, bonzes appartenant à une quinzaine
de confessions issues de tous les horizons spirituels du monde. Ils ont
chanté, prié et réfléchi ensemble, afin que
la paix soit le ciment des nations et que le bruit des armes s’estompe
au profit du dialogue entre les peuples. Une fausse note dans ce sommet:
l’absence du dalaï-lama due à l’intervention de la Chine et
vivement critiquée par des organisations de défense des droits
de l’homme. Les parlementaires ont emboîté le pas aux
chefs religieux et tenu un discours similaire. Lors de cette première
conférence mondiale des présidents de parlements nationaux
de 141 pays organisée par l’Union interparlementaire (UIP), Kofi
Annan, a défendu la cause d’une “justice indépendante, de(s)
partis politiques viables”, de même que la liberté d’expression
afin que chacun puisse “s’exprimer sans crainte ni représailles”.
Le sommet du millénaire a de bien plus grandes ambitions. Il
porte, notamment, sur un plan proposé depuis avril dernier, par
Kofi Annan pour réduire d’ici à 2015 les inégalités
dans le monde. Le secrétaire général des Nations Unies
l’avait déjà soumis aux sept pays les plus industrialisés
et la Russie (G8) réunis en juillet dernier à Okinawa qui
en ont retenu les grandes lignes, sans toutefois lui donner entièrement
satisfaction. Les 160 chefs d’Etat et de gouvernement présents à
New York, sont pressés d’examiner ce plan pour s’accorder à
réduire la pauvreté dans le monde et y assurer un partage
plus équitable des bénéfices de la mondialisation.
Actuellement, près de la moitié des six milliards d’habitants
de la planète subsistent avec moins de 2 dollars par jour et n’ont
pas accès à l’éducation. Les plus pauvres sont les
plus vulnérables. C’est donc à leur secours qu’il faut, selon
le plan Annan, se porter en premier. D’autres problèmes relatifs
à la sécurité et aux conflits armés, aux maladies
et à l’environnement sont à l’ordre du jour et doivent être
traités, tout comme les premiers, dans le cadre de quatre tables
rondes ou groupes de travail. Le plus en vue et le plus recherché
est naturellement le groupe de travail de Bill Clinton, en principe maître
de l’univers jusqu’en janvier 2001 qui doit plancher sur plus d’un dossier
aux côtés des dirigeants de la Chine, de la France, de la
Grande-Bretagne et de la Russie, également membres permanents du
Conseil de Sécurité. Ceux-ci réunis, par ailleurs,
en sommet avec les dix autres membres du Conseil de Sécurité
- et ce sera la seconde fois en l’espace de 55 ans - doivent étudier
les moyens de renforcer les capacités d’intervention de l’ONU en
zones de conflit. A ce jour, les soldats de la paix se sont vu confier
des missions qu’ils n’étaient en mesure ni moralement, ni militairement,
d’assumer.
Le dernier grand rassemblement de ce genre, le sommet du cinquantenaire
de l’ONU s’était tenu en 1995, mais n’avait pas eu l’impact de ce
sommet qui réunit outre 160 chefs d’Etat et de gouvernement, 188
pays désireux tous de faire entendre leurs voix. Seulement, les
dirigeants et représentants de la planète qui n’auront pas
droit à “des événements de gala”, mais (“seule concession
à la tradition”), à une photo de famille, ne disposeront
que de 3 à 5 minutes pour faire entendre leurs voix à la
tribune des Nations Unies. En revanche, ils auront l’opportunité
de s’exprimer longuement à travers des centaines de rencontres bilatérales
que favorisera le sommet où les anciens et les nouveaux vont se
croiser: Bill Clinton, Vladimir Poutine (dont c’est la première
visite à New York comme président), Jiang Zemin, etc... et
Fidel Castro dont c’est la troisième visite au continent américain
depuis 1959, date de sa prise du Pouvoir, la seconde datant de 1995, à
l’occasion du cinquantenaire.
L’impressionnant sommet du millénaire laissera-t-il des traces
durables? En tout cas, beaucoup plus qu’une photo de famille.