NON À LA DURE COERCITION
REJETANT LE JUGEMENT DE LA RAISON
Par MELHEM KARAM
Melhem Karam

Nos paroles doivent s’inspirer de l’indépendance. Car le 22 novembre 1943, marque le retour des hommes de l’indépendance de Rachaya et d’autres prisons. C’est le jour où on se remémore Bchamoun, le gouvernement de Bchamoun, le drapeau et la rencontre de Basta et de Gemmayzé, unifiés sous le leadership de Gemmayzé, pour rassurer qui devait se rassurer de ce que le départ de la France n’éliminerait pas la citoyenneté complète de ceux qui s’illusionnaient que le “Liban du 1er septembre”, le Liban de 1920, est le Liban définitif. Le jour du 22 novembre 1943 a perdu beaucoup de son éclat ou, tout au moins, le halo de prestige libanais qui l’avait escorté ce jour-là. Alors que la mentalité est restée la même, à savoir que la présence française celle du mandat, était la crise chez nous... Dès son élimination, le Liban entrerait au club des Etats capables de prendre la décision engageant leur avenir. Le mandat a été éliminé, ses traces ayant été supprimées à la Chambre des députés à la séance du 8 novembre 1943. A ce moment-là et avec les crises, a commencé à apparaître la joie folklorique. Etant entendu que le folklore a été une étape préparatoire aux lettres classiques dans le monde entier. Ce jour-là, les crises ont commencé, parce que la liesse de la fête a annihilé le concept de l’Etat. Le festival s’est poursuivi jusqu’à ce que la présence palestinienne apparut cinq années plus tard. Le festival étant un cycle ouvert, comme à Cuba après que Fidel Castro eut succédé à Batista à la suite du coup d’Etat de 1959. Avec le temps, la présence palestinienne est devenue la crise au Liban. Au point que le Palestinien dans les camps avant mai 1969 et avant la fermeture des bureaux de l’UNRWA la même année, s’est métamorphosé de réfugié en fidaï. Puis, il y a eu la présence nassérienne sous différents aspects, dont la présence d’Abdel-Hamid Ghaleb, ambassadeur du Caire à Beyrouth. Un autre aspect fut l’Université arabe de Beyrouth... qui fut l’un des foyers réussis de la connaissance chez nous. Nous nous arrêtons là, momentanément, pour dire que nous nous sommes divisés autour de toute présence, française, nassérienne et palestinienne. La rue a toujours été et doit être, le meilleur des justiciers. La rue-opinion; la rue du verbe dit nu et courageux, parfois, quelque peu arrogant. La rue, non la démagogie. La rue est la voix de la conscience publique et de l’opinion publique... A l’instar de ce qu’était devenu le Conseil administratif du Mont-Liban, à certaines périodes du système d’Al-Moutassarifiat reflétant l’opinion publique. Nous nous sommes divisés, nous autres sur eux et ils sont restés unis. Parce qu’ils étaient solidaires, alors que nous étions attachés à bien des considérations, sauf celle de l’unité qui ne s’est pas réalisée avec les Libanais. Nous disons cela avec regret, sauf au début du XXème siècle, avant la Grande Guerre, celle de 14-18. L’unité libanaise n’a pas vécu, ou si peu; un certain matin, pas plus. Elle a vécu entachée d’une grande lacune, à savoir que les Libanais luttant pour leur indépendance au début du XXème siècle, n’étaient pas fixés sur les frontières du Liban en faveur duquel ils militent. Ils aspiraient au littoral de Beyrouth; Beyrouth en tant que limite sur le littoral et jusqu’à la Békaa à l’est. Pourtant, ces frontières sont celles de Fakhreddine. Aucun jour nous n’avons su comment faire de notre présence la plus inexpugnable que toute présence. Si nous l’avions su, nous n’aurions pas été divisés. Nous le restons. J’ignore pourquoi nous devons voir dans une catégorie libanaise déterminée, ce que nous ne voyons pas dans une autre catégorie. Pourquoi le Liban serait une présence dans la vision de gens et une étape itinérante dans celle des autres. Si nous voyons cela, nous condamnons le Liban et l’essence libanaise.
Le Mont-Liban est une présence libanaise importante. Mais ce n’est pas tout le Liban. La cause de cela réside en ce que le Liban était la montagne, de 1516 à 1920. De l’émirat, aux deux caïmacamats et au moutassarifiat ayant pris fin avec Jamal Pacha en 1916 et ayant eu comme successeurs trois gouverneurs turcs musulmans, contrairement au système du moutassarifiat, comme des protocoles de 1861 et 1864, ces derniers stipulant que le moutassaref devait être un chrétien, ressortissant de l’Etat ottoman.
La montagne est restée le Liban, le Mont-Liban durant quatre cents ans. Quatre cents années ne pouvaient pas être biffées d’un trait de plume, comme la féodalité. Le moutassarifiat a-t-il aboli la féodalité en faveur de la démocratie? Non, il l’a abolie pour reposer les paysans du Kesrouan, en parfaite entente avec les cheikhs, car toutes les révoltes ont été occasionnées par la féodalité. La révolte contre l’injustice, de 1841 à 1845 et 1860... Et contre ceux qui ont exercé un complexe de supériorité sur les “habitants’. Le moutassarifiat a aboli la féodalité et maintenu le confessionnalisme. De ce fait, le Mont-Liban est devenu le pays des six communautés: maronite, grecque-orthodoxe, grecque-catholique, sunnite, chiite et druze. Les maronites et les druzes jouissaient de privilèges, parce qu’ils formaient les deux éléments constitutifs du Liban historique et du Mont-Liban. Aujourd’hui, le Liban est devenu le Liban de l’indépendance. Mais, ni ce Liban a duré, ni l’indépendance. Le Liban ne peut rester une montagne. C’est la montagne, le littoral et la vallée. C’est l’homme qui se complète au plan libanais sur toute la terre libanaise, sur la superficie devenue une partie du monde arabe. Le monde qui plonge au nord dans les eaux de la Méditerranée, dont le sud asiatique est collé à l’océan Indien.
Ce Liban-là, est-il permis qu’il reste éloigné de son unité? Qu’il ne la récupère pas, comme au début du siècle dernier, au temps de sa lutte en faveur de l’indépendance?
La spécificité libanaise qui était en permanence au sein de l’équivalence libanaise, réside en ce que le XXème siècle ouvre les yeux sur le Liban recherchant son indépendance, après l’avoir prise et perdue, parce qu’il n’a pas connu la grâce. Comme si le tribalisme confessionnel chez nous, surtout après la féodalité, s’est mis à rire de ceux qui l’ont aboli d’un trait de plume. Parce que le Liban doit sortir de toutes ces expériences, plus fort qu’il est sorti du moutassarifiat, en vue de la stabilité des communautés, dans l’espoir qu’ainsi il ne se divise pas autour de la présence syrienne et dise, unifié, le mot unique, sage, courageux et responsable sur une question qui ne se traite pas, nous le répétons encore une fois, par la coercition dure rejetant le jugement de la raison qui doit dominer les comportements de tous.

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