Le
président Charles Hélou sest éteint le matin du
dimanche 7 janvier, suite à un arrêt cardiaque. Il a choisi,
dirait-on, de partir à lheure où le Vatican clôturait
le grand jubilé du millénaire. En lui, le Liban perd un
être dexception aux grandes qualités desprit et de
cur. Tous les hommages qui lui ont été rendus
témoignent de la place quil occupait au sein de la nation et bien
au-delà et de la force de son message. Sa mémoire vivra
éternellement comme les Cèdres du Liban, écrit le
chef de lEtat, le général Emile Lahoud sur le registre
familial des condoléances à Kaslik. Journaliste et homme de
lettres, il maniait merveilleusement le verbe et lon a tant à
apprendre de lui. Homme dEtat, il sest impliqué à
fond au service de sa patrie. Il chérissait le Liban avec un sens
démocratique réel qui devrait nous servir de modèle. Il
croyait en la force du dialogue et était en avance pour son temps, dans
son contexte. Fin diplomate, il a porté haut et loin le nom du Liban par
les amitiés profondes quil a tissées, au fil des ans, par
ses écrits, par sa pensée humaniste universelle, par son
engagement continu pour la francophonie dont il a si bien mérité
le nom de père et de chantre lui donnant sa
véritable dimension. Lettré subtile, dune vaste culture
doublée dune mémoire prodigieuse, il avait un don
indéniable de la parole avec cette éloquence du mot, la
profondeur et la précision de la pensée et toujours une fine
pointe dhumour. Son action socio-humanitaire couronne cette vie
intensément remplie, surtout avec la création des
restaurants du cur. Quant à sa foi profonde et
authentique, elle fut son véritable bouclier protecteur, au fil des ans
face aux épreuves du destin et de la souffrance dune nation
quil ressentait au plus profond de son être.
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Fils de
Baabda, Charles Hélou est né à Beyrouth où ses
parents sétaient installés au début du
siècle. Dans un témoignage écrit récemment, il
évoque son enfance: Voici lhistoire dun enfant du
Liban qui vit le jour le 25 septembre 1913 à Beyrouth, à
labri dune antique maison de la rue de Damas dans la partie alors
nommée Karakol el-Abed. Quatrième enfant dune famille
de trois filles et deux garçons, il na que cinq ans lorsque son
père Iskandar, brillant pharmacien, succombe à une bronchite.
Ma mémoire, dit-il, na conservé de lui que de
fragiles traces. Il se rappelle, notamment, que cétait un
excellent conteur qui, le soir, réunissait ses enfants pour leur
raconter des histoires de Antar et de La Fontaine. Sa mère, Marie Nahas,
fille dun riche commerçant de Bab Touma (Damas), prend la
direction de la pharmacie et gère les économies laissées
par son époux. Rien ne lavait préparée, dira
Charles Hélou, à lénormité de pareilles
responsabilités. Les problèmes de jour en jour
saccumulèrent. Fière et courageuse, elle essaya dy
faire face. A lâge de six ans, il entre au petit
collège de lUniversité Saint-Joseph et se rappelle ces
jours disant: Vieux plumiers en bois aux couvercles décorés
de vives couleurs, vous êtes les plus anciens écrins de ma
mémoire. Il arrive au baccalauréat français (il
ny avait pas encore de bac libanais) à lâge de 15 ans
en brillant candidat et doit obtenir une dispense pour être admis
à lexamen avant lâge réglementaire qui
était de 16 ans. Il obtient, en fin détude, le prix
dhonneur de philosophie (décerné par lamicale
des anciens) qui avait pour sujet: Les mathématiques sont une
forme des humanités. A lâge de 87 ans, il se rappelle
toujours de sa conclusion: Cest pourquoi, disais-je, Platon, le
divin Platon avait inscrit à la porte de son Académie: Que
nul nentre ici sil nest géomètre. A la
faculté française de Droit de Beyrouth, il obtient sa licence en
1933, sort premier de promotion et fait son stage à létude
de Me Georges Béchara.
Le président Emile
Lahoud rendant visite au président Charles
Hélou. |
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Le président Charles
Hélou avec le président Elias Hraoui... |
FIGURE DE PROUE DU JOURNALISME Très jeune,
Hélou se lance dans le journalisme dont il devient rapidement une figure
de proue. Il possède, alors, un don incontestable de la parole, de
lécriture et le mot occupera dans sa vie une place de premier
plan. En 1930, il est sollicité pour diriger le journal
LEclair du Nord paraissant à Alep (Syrie). Je
touchais un salaire mensuel de 100 L.L., confie-t-il, alors quau
ministère des Finances où il avait commencé à
travailler, son salaire mensuel était de 30 livres seulement. A
Beyrouth, il dirige ensuite la revue Information, connue pour son
opposition à Charles Debbas, mais cest à travers Le
Jour dès 1934 quil saffirme et simpose dans le
monde de la Presse. Fondé par Charles Ammoun et dirigé par Michel
Chiha, lun de nos grands penseurs et écrivains libanais, Le
Jour, quotidien libanais dexpression française,
défend les idées du Destour (parti constitutionnel)
présidé par cheikh Béchara el-Khoury. Michel Chiha,
maître de pensée de toute une génération, confie
à Charles Hélou la direction politique du journal. Celui-ci
sengage dans ses articles en faveur des idées destouriennes face
à un autre quotidien, LOrient de Georges Naccache, qui
défendait les idées dEmile Eddé et de son parti le
Bloc national (B.N.). En 1936, il collabore à la fondation
du mouvement Kataëb, qui deviendra, par la suite, un parti politique, mais
sen retire rapidement. En 1943, il est aux côtés de
Béchara el-Khoury et des responsables détenus à Rachaya.
Lorsque le général Catroux le reçoit pour connaître
son point de vue sur cette crise, il lui redit ce quil avait
déjà écrit plus dune fois dans ses articles:
Que la première mission du mandataire est de nous apprendre
comment nous passer de lui. Au début du mandat du président
Béchara el-Khoury, Charles Hélou partage ses activités
entre le journalisme et lavocature. Il ne tarde pas à être
appelé à la vie politique et se plaît souvent à dire
dans ses interviews: Le journalisme mène à tout à
condition de savoir en sortir.
... Avec le président
Sleimane Frangié... |
|
... Entouré des
présidents Elias Sarkis et Takieddine Solh... |
LES
DÉBUTS DUNE LONGUE CARRIÈRE POLITIQUE En 1946,
âgé de 33 ans, il est nommé premier représentant du
Liban près le Saint-Siège, à titre de ministre
plénipotentiaire et denvoyé extraordinaire. Ce fut son
premier voyage par avion et sa première mission diplomatique.
Dailleurs, lart de la diplomatie sera lune des
caractéristiques de ce grand homme dEtat. Il a souvent
évoqué sa vive émotion face à Pie XII, au moment
où il lui présentait ses lettres de créance, alors que le
Saint-Père parlait du Liban avec une parfaite connaissance et affection
sans lavoir jamais visité. Je ne pouvais retenir mes
larmes, disait-il. Il occupe ce poste de toute importance de 1946
à 1949 et une profonde amitié le liera à
lévêque Jean-Baptiste Montini qui deviendra Paul VI. En
octobre 1949, il est rappelé à Beyrouth pour occuper le poste de
ministre de la Justice et de lInformation au sein du gouvernement de Riad
Solh. Mais dans le pays, le climat politique a changé: la corruption
sévit dans les hautes sphères du Pouvoir, les partisans du
président Béchara el-Khoury se démènent pour
assurer le renouvellement de son mandat, alors que Michel Chiha et Le
Jour sont passés dans lopposition, proclamant leur refus de
la reconduction du sexennat présidentiel. Hélou ne restera pas
longtemps ministre; il présente sa démission pour protester
contre une violation de la loi. Ce choc positif, lui confère
une nouvelle auréole politique au sein des courants dopposition de
plus en plus nombreux dans le pays. Il obtient une victoire fulgurante aux
législatives de 1951 et devient député de Beyrouth.
Nommé ministre des Affaires étrangères en 1951 sous le
Cabinet Yafi, il préside la délégation libanaise à
lONU. Des changements politiques ont lieu dans le pays. Béchara
el-Khoury est forcé de démissionner en septembre 52. Camille
Chamoun est élu président de la République. Charles
Hélou qui était un partisan de Béchara el-Khoury, mais a
voté pour Chamoun, choisit de mettre sa vie politique en veilleuse et ne
se présente pas aux législatives de 53. Nempêche
quen 1954, Chamoun lui confie les A.E. au sein du Cabinet Sami Solh; il
demande plutôt la Justice pour y faire quelques réformes et est
nommé ministre de la Justice et de la Santé. Il conserve ce
double portefeuille durant un an et démissionne suite à un
conflit avec le Premier ministre. Il séloigne de la politique.
Avec les événements de 1958, il forme avec un groupe de
personnalités neutres une troisième force, face aux
deux courants en conflit en vue de maintenir le dialogue. Avec laccession
du général Fouad Chéhab à la Présidence en
1958, plusieurs missions à létranger, notamment au Vatican
et à Paris, lui sont confiées étant donné sa grande
culture, son savoir-faire diplomatique et les amitiés quil a
nouées au fil des années. En 1962, il est nommé
président du Conseil national du Tourisme et donne une impulsion
à cet organisme. Nommé ministre de lEducation nationale en
1964, au sein du dernier gouvernement chéhabiste, son nom est
avancé comme futur chef dEtat. Chéhab qui a,
catégoriquement, refusé le renouvellement de son mandat, loue ses
qualités, sa grande intégrité et probité, avance et
appuie son nom pour la magistrature suprême.
... Avec le président
Sleimane Frangié... |
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... Entouré des
présidents Elias Sarkis et Takieddine Solh... |
HÉLOU, QUATRIÈME PRÉSIDENT DU LIBAN
INDÉPENDANT Le 17 août 1964, Charles Hélou est
élu quatrième président de la République libanaise
par 92 voix, à la quasi-unanimité de la Chambre. Cinq
députés votent pour Pierre Gemayel, leader des Kataëb et on
relève deux bulletins blancs dans lurne. Il sinstalle
à Sin el-Fil; puis à la fin de son mandat, au palais
présidentiel de Baabda quil avait fait construire. Au militaire
quétait Fouad Chéhab, succède un civil
profondément attaché aux valeurs démocratiques, à
la liberté et au dialogue. Son mandat sera marqué par
différentes crises dues à la conjoncture interne et, surtout, aux
bouleversements régionaux. Les proches du Président, dont Michel
Eddé qui fut ministre sous son mandat en 1966, au sein du gouvernement
Karamé, témoignent de sa brillante intelligence, de sa
mémoire prodigieuse, de son exceptionnelle capacité de travail,
de sa grande sagesse, de son sens du devoir et ses qualités de
cur. Mais cest sa foi chrétienne profonde qui lui a permis
de surmonter toutes les épreuves. Sur le plan interne et au cours
des deux premières années de son mandat, il subit lemprise
des Chéhabistes et du second bureau qui cherchaient à
maintenir, à travers sa personne, la continuité du régime
sortant. Cétait mal le connaître. Il a souffert en silence
de cette mainmise et, avec son tact diplomatique, a travaillé en douce
pour sen libérer sachant quil ne pouvait le faire de face.
Ce ne fut pas une tâche facile et il a dû souvent à
contrecur composer avec les militaires. La seconde crise quil a
affrontée et réussi à surmonter avec beaucoup de tact, a
été le krash de la banque Intra, en 1966, dû aux fraudes
énormes commises par son fondateur Youssef Beidas, Palestinien
dorigine ayant pris la fuite du Liban à lheure de la
déroute bancaire, laissant la Intra à la
dérive. LEtat, sous la vigilance du président Hélou
a payé aux épargnants jusquau dernier sou, tout en
évitant à la nation une débâcle financière.
... Et avec les
présidents Amine Gemayel et Camille Chamoun. |
LACCORD DU CAIRE: HÉLOU SEXPLIQUE
Le Liban ne participe pas à la guerre de juin 1967, mais subit plus que
tout autre pays arabe, les contre-coups de la défaite. La montée
du nationalisme arabe et, surtout, la création du mouvement palestinien
Fateh et la présence de plus en plus grandissante de
fedayine armés déterminés à mener la
guérilla contra Israël à partir du Liban, provoquent une
crise politique grave, qui sachève par la signature de
lAccord du Caire, le 3 novembre 1969. De la date de la
signature de cet accord, jusquà la fin de sa vie, Charles
Hélou souffrait au plus profond de son être dentendre les
Libanais le rendre responsable de cet accord, tout en occultant les
circonstances internes et régionales qui lont acculé
à y souscrire. A travers ses interviews et dans ses
Mémoires, il a longuement expliqué toutes les
données ayant abouti à cet accord qui, pour lui, était un
arrangement militaire visant à réglementer laction des
fedayine au Liban dans le respect de la souveraineté nationale. Ce qui
ne fut pas le cas hélas! par la suite. Il suffit de rappeler quen
avril 1969, suite à un conflit entre larmée libanaise et
les fedayine, Rachid Karamé, Premier ministre démissionne, refuse
de former un nouveau Cabinet et tout autre sunnite décline cette charge.
Trois sommets islamiques ont lieu à Aramoun pour appuyer laction
des fedayine qui bénéficiaient, aussi, du soutien des pays
arabes. Ce mouvement pro-palestinien a préfiguré la guerre du
Liban (1975-90). Le président Hélou voyait venir le drame et les
analystes politiques disaient: Il en a retardé
léchéance. Car nul ne pouvait léviter.
Le Liban, disait-il, a été programmé pour être
projeté dans cet engrenage infernal.
Le président
Hélou avec S.S. Jean-Paul II... |
|
... Avec S.S. Paul
VI... |
LES
AMITIÉS INTERNATIONALES JOUENT EN FAVEUR DU LIBAN Les liens
quavait tissés le président Hélou au sein du monde
arabe et occidental se traduiront, sous son mandat, par laccueil de
plusieurs chefs dEtat et des visites présidentielles à
létranger. Le 2 décembre 1964, S.S. Paul VI, en route vers
lInde, fait une escale à laéroport de Beyrouth et le
pays lui réserve un accueil officiel et populaire à nul autre
pareil. Charles Hélou reçoit au Liban le roi dEthiopie,
Haïlé Sélassié, le président tunisien Habib
Bourguiba, le roi Hussein de Jordanie, le président Senghor, etc... En
mai 1965, il se rend au Caire pour y rencontrer le président Gamal
Abdel-Nasser; puis, effectue en France, la première visite officielle
dun chef dEtat libanais depuis la fin du mandat. Il est reçu
par Charles de Gaulle. Lorsque le 28 décembre 1968, Israël
bombarde, détruit un sol de laéroport international de
Beyrouth, treize avions de la MEA, en signe de représailles pour un
attentat contre la compagnie israélienne El-Al, commis
à Athènes par des Palestiniens partis de Beyrouth, Hélou
obtient un réel appui international. LONU condamne Israël et
lui demande de payer des indemnités au Liban. Charles de Gaulle est
virulent dans sa condamnation et suspend une vente de Mirage
à lEtat hébreu. En dépit de toutes ces crises
internes et régionales, le mandat de Charles Hélou est
marqué par une stabilité, une prospérité
économique, un épanouissement socio-culturel et des
élections libres en 1968, avec la formation du Helf
(alliance Chamoun, Gemayel, Eddé) face au second bureau
chéhabiste. Il a appuyé, discrètement, cette alliance qui
remporte la victoire. Le parlement change de visage et en août 70,
Sleiman Frangié est élu chef dEtat avec une voix
davance sur Elias Sarkis, candidat chéhabiste.
... Avec le roi Hussein de
Jordanie. |
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Le président et Mme
Charles Hélou et le président et Mme Charles de
Gaulle... |
CHANTRE DE LA FRANCOPHONIE Si, comme tout homme
politique, Charles Hélou pouvait avoir des amis, des partisans et des
adversaires, par contre, sa grande culture, ses écrits, son humanisme,
sa foi profonde, son attachement aux valeurs suprêmes, son rôle
ininterrompu en faveur de la francophonie, son action sociale faisaient
lunanimité autour de sa personne hors du commun, non seulement au
Liban, mais au sein du monde arabe et à léchelle
internationale. Son mandat présidentiel terminé, il choisit de
sinstaller avec son épouse à Kaslik, en cette
résidence doù son action rayonnera au cours des trente
dernières années. Dès 1970, il est sollicité par
lAssociation des parlementaires de langue française,
pour en être membre dhonneur aux côtés
dAndré Malraux. En 1972, lAssociation décide,
à lunanimité, de lélire à la
présidence de tous les parlementaires francophones et ce mandat lui fut
renouvelé six fois. Cette présidence lui a permis de parcourir
avec les membres de lAssociation les pays francophones. Les
assemblées générales et réunions quil y
tenait, les discours quil prononçait avaient le mérite
daffirmer avec art et persévérance la présence
culturelle du Liban sur tous les continents. Il sera de même
président, pendant trois ans, de lAgence de
Coopération culturelle et technique qui a lancé deux
concours universels portant son nom. En 1986, il fut nommé membre du
Haut Conseil de la Francophonie qui venait dêtre
créé par le président François Mitterrand. Il est
bien difficile, dailleurs, de cerner, en quelques lignes, laction
immense menée par Charles Hélou en faveur de la francophonie.
Ainsi que la exprimé le chef de lEtat, nous ressentons tous
le même regret quil se soit éteint avant la tenue du sommet
francophone à Beyrouth au mois doctobre.
Avec le président
tunisien et Mme Habib Bourguiba. |
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Les présidents
Hélou et Chamoun et M. Kurt Waldheim. |
GRAND HUMANISTE Elève des pères
Jésuites, Charles Hélou présidera, de 1987 à 1992,
lAssociation des anciens élèves de lUSJ et du
Collège Notre-Dame de Jamhour. Les anciens et les jeunes
générations sont tous fiers dappartenir à une grande
famille rassemblée autour dun héritage moral, intellectuel
et culturel commun. Tout au long de sa vie, il a constitué une
bibliothèque exceptionnelle où tous les livres ont
été lus, relus et annotés par lui. Il y a quelques mois,
il décidait doffrir la moitié de cette riche
bibliothèque à lamicale des anciens de Jamhour,
après avoir offert lautre moitié à
lUniversité Saint Esprit de Kaslik. Le 9 novembre, une
cérémonie émouvante a eu lieu à Jamhour en sa
présence, pour marquer la création dune salle et dune
bibliothèque portant son nom. Plusieurs témoignages ont
été prononcés, y compris celui du président
lui-même lu par son neveu, Me Joe Khoury Hélou et son curriculum
vitae, auquel nous nous référons, a été remis
à lassistance. LUSEK préparait un grand hommage
à Charles Hélou dans le courant de ce mois, tel que nous confie
son recteur, le R.P. Joseph Mouaness. Quand je lui en ai parlé, dit-il,
il ma répondu: Je me demande seulement, si vous avez
vraiment besoin de ma contribution. La cérémonie a eu lieu
en hommage au grand disparu. Grand humaniste, sensible aux problèmes
sociaux et drames de la vie quotidienne, il a fondé en 1983, avec le
concours dAntoinette Kazan, son assistante, les restaurants du
cur quil présidera jusquà sa mort. Il
était particulièrement attaché à cette Association
qui groupe, aujourdhui, 27 restaurants offrant, tout au long de
lannée, des repas gratuits à des nécessiteux. Tant
que sa santé le lui avait permis, il lui arrivait souvent de partager le
repas avec des personnes démunies et cachait mal son émotion. Il
était, par ailleurs, président dhonneur de plusieurs
uvres caritatives et sociales, son souci majeur ayant été
de soulager autant que possible la souffrance. Conscient, aussi, de
limportance des médias audiovisuels, il sera président
dhonneur de Télé Lumière qui lui a rendu
un vibrant hommage à travers une retransmission permanente en direct des
condoléances à Kaslik, des funérailles et par des
témoignages vivants.
UNE
FOI PROFONDE De toutes les valeurs et qualités morales,
intellectuelles, humaines que lon cite en évoquant la vie et
luvre de Charles Hélou, il en est une qui dépasse et
coiffe le tout: cest sa foi profonde et authentique en Dieu. Une foi qui
lui a permis de faire face à toutes les épreuves du destin. Nul
nest à labri de ces épreuves, à plus forte
raison lorsquon assume la première magistrature de lEtat et
tant de postes de responsabilités. Ces dernières années,
un prêtre venait célébrer la messe tous les dimanches en la
résidence de Kaslik et cétait un moment de grâce
réelle que dy participer à ses côtés. Le mot,
lécriture, la majesté du verbe, de la parole sont
lautre trait spécifique qui accompagnera Charles Hélou tout
au long de sa vie. Il a entamé sa vie professionnelle comme journaliste
et na jamais cessé décrire, de publier et de donner
des conférences... Chaque interview quil nous accordait
était un moment privilégié, vu la force de sa
pensée, la précision du mot, sa mémoire fabuleuse et son
humour fin. Il a plusieurs publications en langue française à son
actif: Mélanges (tome I et II), Discours sur
lUniversalité de la francophonie, Liban, cette part de
Dieu, Liban, remords du monde, Nina, ou la quête
de limpossible, deux uvres théâtrales et des
Mémoires en cinq tomes. Dans son postface de Liban,
remords du monde, Jean Guitton, de lAcadémie
française écrit: ... Jai lu ce livre admirable. Ce
nest pas un livre, cest une prophétie, analogue à
celles dIsaïe, dAmos, de Jérémie, un livre
écrit non avec une plume, mais avec du sang. Un livre qui pourrait avoir
pour exergue les mots de Saint Jean lévangéliste: ce que
nous avons vu, ce que nos mains ont palpé, le voici.
NINA, LA COMPAGNE DE SA VIE
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Fille de Michel Trad, frère du président Petro Trad, de
mère colombienne, Nina Trad fut la première femme avocate au
Liban et la première femme membre du Conseil municipal de Beyrouth.
Jeune avocat, Charles Hélou sattache à cette
collègue petite de taille, mais bien proportionnée, dotée
dune grande intelligence, de valeurs morales et intellectuelles. Les
parents de Hélou nétaient pas favorables à leur
mariage, car Nina était plus âgée que lui. Il nen
tient pas compte et ils unissent leur vie au début des années
cinquante. Elle sera à ses côtés lépouse
aimée et écoutée; la compagne dévouée et
diligente. Elle savait être la femme à la hauteur de toutes les
situations. Atteinte dun mal incurable, dès 1987, Charles
Hélou sera constamment à ses côtés pour laider
à vivre cette épreuve cruelle. Elle meurt en 1989 et il a
écrit sur elle un livre poignant: Nina, ou la quête de
limpossible où il fait le récit de la maladie et de
la lente agonie de celle avec qui il a partagé quarante années de
vie commune. |
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