Le dossier de l’électricité
continue et, pour cause, à dominer la scène locale et semble
devoir défrayer, longtemps encore, la chronique tant politique
que judiciaire. Et ce, dans l’attente de la reprise des séances
hebdomadaires du Conseil des ministres, après la fin des vacances
officielles, le 4 septembre prochain. Avant de se séparer, les
membres du Cabinet ont tranché trois sujets de première
importance: ceux de l’électricité, du Conseil du développement
et de la reconstruction et des déchets solides. Dans le feu des
délibérations et des discussions souvent envenimées,
le chef de l’Etat a mis l’accent sur la nécessité
d’entreprendre, enfin, la réforme administrative, pour éradiquer
la corruption et assurer une application rigoureuse de la loi. “Ceux
qui, précédemment pouvaient entraver la réforme,
a dit le président Lahoud, sont incapables maintenant d’en
arrêter le processus”.
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En ce qui concerne l’électricité, décision
a été prise de supprimer les branchements illicites sur
le réseau qui font perdre à l’EDL des sommes considérables
au cours de l’année, ce qui aggrave le déficit de
l’office.
Dans le même temps, il sera procédé à une enquête
judiciaire pour déterminer les responsabilités dans la gestion
de l’EDL, à partir des “commissions” qui auraient
été perçues par ceux qui ont charge de fournir le
fuel oil.
SOLUTION PROVISOIRE
La décision telle qu’adoptée par le Conseil des ministres
n’a pas eu l’heur de plaire à M. Ayoub Hmayed, ministre
de l’Energie et de l’Eau qui l’a jugée “insuffisante”.
Surtout en ce qui a trait au prêt à contracter auprès
des banques privées: le montant global a été fixé
à 100 milliards de livres libanaises, alors que le ministre en
réclame le quadruple, avec la garantie de la Banque du Liban, cette
somme devant assurer l’achat du carburant jusqu’à la
fin de l’année courante. Rappelons que le gouvernement s’est
opposé à l’octroi d’une avance sur le Trésor
à l’EDL et, aussi, à la majoration du tarif de l’abonnement.
Quoi qu’il en soit, le président de la République
s’est promis de reprendre l’étude en profondeur du
dossier de l’électricité, à la faveur de séances
de travail dès le début de septembre prochain, le problème
électrique devant être débattu sous les angles administratif,
technique et financier. Car il s’est agi, cette fois, d’une
“solution provisoire”.
Le président Rafic Hariri a justifié la décision
gouvernementale de ne pas souscrire à la demande du ministre de
tutelle de l’EDL, de lui accorder une avance sur le Trésor
en ces termes: “Notre but est de faire assumer la responsabilité
à l’Office de l’Electricité, en l’amenant
à renforcer la perception des quittances avec le soutien des FSI
et, en cas de besoin, de l’Armée”. Et d’ajouter:
“Toute personne qui profite du courant électrique, est tenue
d’en acquitter le prix et je suis certain que l’application
de la décision relative à la suppression des branchements
illicites, donnera d’excellents résultats sur le plan financier”
en ce sens qu’il réduira le déficit de l’EDL
d’une façon substantielle.
En ce qui concerne le CDR, le Conseil des ministres a confié à
la commission ministérielle ad hoc présidée par M.
Issam Farès, le soin de reconsidérer les structures de cet
organisme, un rapport à ce sujet devant être soumis le 4
septembre au Conseil des ministres.
A ce propos, le Premier ministre a assuré que “tout se déroulait
conformément à la loi”.
QUID DES DÉCHETS SOLIDES?
Cependant, la décision relative aux déchets solides, à
leur ramassage et à leur destruction, continue à faire l’objet
d’une vive controverse, à tel point que même le ministre
de l’Environnement, M. Farès Bouez s’est montré
sceptique quant à la possibilité pour les municipalités
de prendre la relève de la société “Sukleen”,
dont le contrat sera résilié d’ici à six mois.
M. Bouez estime, en effet, que les municipalités ne sont ni équipées
ni préparées à assumer une telle charge particulièrement
complexe et coûteuse.
Fait à signaler: après s’être opposé,
précédemment, à la résiliation du contrat
avec la société mentionnée, le président Hariri
a proposé lui-même une telle mesure, sans expliquer les raisons
de sa volte-face. “Vous les connaissez” s’est-il contenté
de répondre aux questions des reporters de presse.
On apprenait, par la suite, que le président du Conseil était
d’avis qu’il fallait organiser une adjudication publique pour
l’ensemble du Liban et non seulement pour la capitale et une partie
du Grand-Beyrouth, les municipalités devant prendre en charge les
opérations de ramassage des déchets et de leur transport.
A cet effet, le cahier des charges pour l’organisation d’une
adjudication internationale devra être mis au point dans un délai
de trente jours. Et l’adjudication terminée en l’espace
d’un semestre, délai imparti à “Sukleen”
pour rompre son contrat.
Il nous revient qu’une discussion particulièrement virulente
a opposé, à ce sujet, M. Issam Farès et M. Fouad
Sanioura, ministre des Finances, mais on n’a pas pu en connaître
la teneur.
HARIRI: “J’AI RÉSOLU DE RESTER TRANQUILLE”
En quittant le siège du Conseil des ministres, le président
Hariri a déclaré aux reporters de presse qui l’interrogeaient
sur les sujets des délibérations ministérielles.
“J’ai résolu de me reposer et de rester tranquille
durant deux semaines”. C’est-à-dire jusqu’au
4 septembre.
Entre-temps, le président Nabih Berri est déterminé,
selon sa coterie, à ouvrir tous les dossiers, à commencer
par celui de l’électricité. Et ce, après avoir
levé toute couverture politique de deux anciens ministres après
les avoir radiés de “Amal”.
“Le dossier de l’EDL sera largement ouvert de A à Z”,
assure un proche du chef du Législatif, en précisant que
les investigations porteront non sur les dernières années,
mais depuis le début la IIème République, surtout
en ce qui concerne le financement des travaux et l’achat des équipements
pour lesquels des “commissions” faramineuses auraient été
versées à certains courtiers, plusieurs parmi eux ayant
été proches des “princes de la guerre”.
La tendance générale est pour l’ouverture de tous
les dossiers et le chef de l’Etat a dit en Conseil des ministres:
“Les Libanais ont le droit de savoir où sont passés
les 3 milliards de livres octroyés à l’EDL”.
Il y a lieu de signaler que le dossier du ministère de l’Agriculture
fait, également, l’objet d’une enquête approfondie,
visant à déterminer l’affectation des crédits
mis à sa disposition au cours des dernières années.
Et ce, dans le cadre de la campagne déclenchée contre la
corruption et les corrupteurs.
Par ailleurs, les milieux proches du président Nabih Berri lui
prêtent l’intention de descendre, s’il le faut, dans
la rue, à la tête d’une manifestation monstre de “Amal”,
en vue de s’opposer à l’institution de nouveaux impôts
et taxes, “même si cela devait se faire aux dépens
de la deuxième présidence”.
Ainsi, on peut déduire que les vacances ministérielles n’ont
pas atténué l’acuité de la grogne qui affecte
tous les secteurs et les niveaux. Le président de la République
a pris lui-même la tête du mouvement destiné à
éradiquer la corruption sous toutes ses formes.
Certains n’écartent pas la possibilité d’un
changement de Cabinet en automne, si ce dernier s’avère nécessaire
pour mener à bien la lutte anticorruption.
Sur un autre plan et après la “descente” qu’il
a effectuée au début de la semaine dernière à
l’EDL, le président Lahoud s’est rendu, inopinément,
dans deux centres de villégiature, Aley et Bhamdoun, pour se renseigner
sur place du rôle que les municipalités sont en mesure de
jouer dans l’exécution des projets d’utilité
publique, pour réactiver le cycle de la vie nationale.
“L’Etat, a déclaré à cette occasion le
président Lahoud, a le devoir de se tenir aux côtés
des municipalités productives et de leur accorder les facilités
requises pour aider à la réalisation des projets susceptibles
de les sortir du marasme”.
Au plan arabe, le président de la République a conféré
avec M. Nabil Chaath, ministre d’Etat palestinien pour les Affaires
étrangères, avec lequel il a évoqué longuement
la question de la présence des Palestiniens au Liban. Il a saisi
cette occasion pour réitérer son appui au retour des réfugiés
en Palestine et s’opposer à leur implantation dans les pays
d’accueil pour n’importe quel motif. “Le conflit israélo-arabe
ne peut être réglé aux dépens du droit de retour
des Palestiniens de la diaspora”, a-t-il affirmé une fois
de plus.
Enfin, il s’est montré sceptique quant à la possibilité
d’instaurer la paix au P.-O. tant qu’Ariel Sharon est au pouvoir
en Israël, “l’homme étant connu pour son hostilité
à tout ce qui favorise la paix”. |