Au Salon du Livre francophone, Vénus
Khoury-Ghata a signé son nouveau roman: “Le Moine, l’Ottoman
et la femme du grand argentier” et participé à plusieurs
conférences-débats et cafés littéraires.
Poétesse et romancière libanaise, née au nord du
pays dans le village montagneux de Bécharré, Vénus
a fait des études de lettres et débuté sa carrière
comme journaliste à Beyrouth. En 1972, elle s’installe en
France et collabore à la revue “Europe”, alors dirigée
par Louis Aragon qu’elle traduira en arabe avec d’autres poètes.
Son œuvre est riche et abondante: quinze recueils de poèmes,
qui ont reçu plusieurs prix et ont été récompensés,
en 1993, par “le prix de la Société des gens de lettres”
et quinze romans. “J’ai eu deux maris, confie-t-elle et quatre
enfants, deux filles et deux garçons”.
Son présent livre: “Le Moine, l’Ottoman et la femme
du grand argentier”, publié chez “Actes Sud”,
est une fresque historique haute en couleur et en rebondissements. “C’est
une histoire d’amour brûlante, vieille de deux siècles”,
dit-elle. Elle raconte l’histoire de la femme du grand argentier
de Saint-Jean d’Acre qui, en 1792, s’enfuit avec son amant,
le représentant du Sultan Salim III. Son mari charge, alors, les
pères trinitaires de la retrouver et le roman nous entraîne
sur les routes du monde avec plein d’aventures...
“Ce roman, précise Vénus, fait revivre toute une période
historique et révèle, surtout, l’existence des pères
trinitaires, des moines qui, depuis le XVème siècle, allaient
à la recherche des captifs enlevés par les barbaresques.
“Concernant l’intrigue, ajoute-t-elle, j’explore toujours
les mêmes histoires d’amour et de mort. Je suis une spécialiste
du genre, l’amour adultère étant puni, quelque part,
par les dieux”.
ÉCRIRE EN FRANÇAIS SANS RISQUE
Vénus Khoury-Ghata vit en France depuis trente ans et considère
qu’écrire en français est pour elle “sans risque
et sans danger, comme si je me masquais et ne marchais pas à visage
découvert.” La langue de Molière lui procure “un
vaste espace de liberté” qu’elle n’aurait jamais
pu avoir, si elle avait voulu publier en arabe au Liban, certains récits
évoquant la guerre qui a meurtri son pays natal: “Cela aurait
été trop dangereux”.
“Avec la langue française, poursuit-elle, c’est une
alliance conjugale de trente ans, alors que la langue arabe est comme
l’amant qui se faufile dans mes phrases clandestinement et enrichit
mes dialogues”.
Se sent-elle comme une exilée en France? “Pas du tout, répond
Vénus. J’habite la langue française et je me sentirais
exilée le jour où je cesserais d’écrire”.
Par ailleurs, elle revient au Liban chaque fois qu’elle a un nouveau
livre et affirme: “J’adore ce Salon du Livre francophone.
Il prouve que le Liban qui a été mis à feu et à
sang, il y a quinze ans, a retrouvé sa réputation de pays
civilisé, magnifique, généreux, où on vient
de partout se ressourcer. Les écrivains et mes amis aiment tant
y venir”.
Vénus voyage beaucoup en Europe et en Amérique, car ses
poèmes sont traduits en onze langues. Elle était en Italie,
en Suède et vient d’achever une tournée dans douze
universités aux Etats-Unis où elle a donné lecture
de ses poèmes traduits en américain. “Mes poèmes
me font voyager”, dit-elle.
Quant au succès que connaissent ses romans, elle l’explique
en ces termes: “Parce que je suis une conteuse, je sais raconter,
émouvoir et toucher. J’ai le respect du lecteur, car lorsqu’il
prend un livre, il doit en être passionné pour le terminer.” |