Le jour de gloire est arrivé pour Abouna Yaaqoub et pour tous les Libanais! Ce dimanche 22 juin est à marquer d’une pierre blanche et restera dans les annales la date mémorable de la béatification de ce pieux et humble prêtre de la montagne libanaise. Cet “Apôtre de la charité” qui a passé sa vie dans l’effacement de son labeur missionnaire en faveur des plus pauvres, est aujourd’hui projeté en pleine lumière. C’est au cours d’une messe de béatification - la première en terre libanaise et au Moyen-Orient - que le délégué du pape Benoît XVI, le cardinal José Saraïva Martins, préfet de la Congrégation pour les Causes des Saints, a solennellement proclamé Abouna Yaaqoub, capucin (P. Jacques Haddad), Confesseur de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins, fondateur des Franciscaines de la Croix du Liban, nouveau “Bienheureux” de l’Eglise universelle et l’a présenté à la vénération des fidèles.
Au cœur de Beyrouth, en présence de plusieurs dizaines de milliers de fidèles - avec à leur tête les plus hauts responsables du pays - rassemblés place des Martyrs, en ce lieu symbolique où furent pendus des patriotes libanais en 1916, s’est déroulée la messe solennelle de béatification. Le délégué du Souverain Pontife, le cardinal José Saraïva Martins officiait sous un portique géant (le même qui a servi lors de la visite du pape Jean-Paul II en 1997), assisté de six concélébrants (dont le nonce apostolique Mgr Luigi Gatti et le père capucin Hamm). La messe a été entièrement célébrée en rite latin, sauf l’Evangile lu en arabe par le patriarche maronite le cardinal Nasrallah Sfeir qui a, également, prononcé l’homélie dans cette langue. Plusieurs chorales ont animé les grands moments de cette messe solennelle aux accents de majesté divine: la chorale de N.-D. de Louaïzé dirigée par le père Khalil Rahmé; la chorale antonine sous la direction du père Toufic Maatouk; la chorale byzantine du Mont-Liban dirigée par M. Antoine Yazbeck, ainsi que la chorale des sœurs franciscaines de la Croix et l’orchestre du Conservatoire national de musique.
L’immense foule de fidèles au premier rang de laquelle, le président de la République et Mme Michel Sleiman, le chef du Parlement Nabih Berri et le Premier ministre et Mme Fouad Sanioura.
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Le cardinal Martins officiant assisté du Nonce apostolique Luigi Gatti,
du père Bernard Hamm et de prêtres capucins.
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UN RITUEL BIEN ÉTABLI
Selon un rituel bien établi, après l’entrée en procession du cardinal et des officiants, la cérémonie de béatification s’est déroulée en trois temps: présentation de la requête de l’évêque, la lecture du profil biographique du nouveau bienheureux et enfin la lecture par le cardinal de la Lettre Apostolique certifiant la béatification, suivie du lever de voile sur le portrait officiel du nouveau béatifié trônant au-dessus de l’autel. Cet instant solennel est accueilli par des applaudissements nourris des fidèles.
Le maître-autel surmonté du Christ-roi et du tableau officiel de Abouna Yaaqoub lors de la cérémonie de béatification, place des Martyrs.
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Le délégué du Souverain Pontife, le cardinal José Saraïva Martins donnant lecture de la Lettre Apostolique ou décret de béatification.
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La requête de l’évêque est présentée par Mgr Paul Dahdah, vicaire apostolique des Latins au Liban en ces termes: “Le Vicariat Apostolique latin au Liban, la vice-Province des Frères Mineurs Capucins et la Congrégation des Franciscaines de la Croix du Liban ont demandé humblement à Sa Sainteté le Pape Benoît XVI de vouloir inscrire au nombre des Bienheureux le Serviteur de Dieu, Abouna Yaaqoub, le Père Jacques Haddad de Ghazir”.
Le patriarche Sfeir proclamant l’Evangile.
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Les prélats participant à la béatification avec à leur tête
le patriarche cardinal Nasrallah Sfeir.
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C’est ensuite le vice-postulateur de la cause de Abouna Yaaqoub, le père Salim Rizkallah, OFM capucin qui lit le profil biographique du nouveau Bienheureux, en présentant les différentes étapes de sa vie depuis sa naissance à Ghazir, le 1er février 1875 dans une pieuse famille maronite de quatorze enfants, jusqu’à sa mort survenue le samedi 26 juin 1954 à 3 heures de l’après midi, à l’âge de 80 ans; rappelant aussi toutes ses nombreuses réalisations sociales et caritatives.
Un groupe de religieuses de la Croix applaudissant au moment solennel
du lever de voile sur le portrait de Abouna.
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Selon la tradition, des offrandes ont été remises au délégué du Souverain Pontife.
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LA PROCLAMATION SOLENNELLE
Enfin, par délégation de Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, le cardinal José Saraïva Martins donne lecture de la Lettre Apostolique par laquelle le Souverain Pontife a inscrit au nombre des Bienheureux le serviteur de Dieu Abouna Yaaqoub: “Nous, pour répondre au désir de notre Frère Paul Dahdah, archevêque titulaire de Are en Numidie, Vicaire apostolique de Beyrouth des Latins et de nombreux autres frères dans l’Episcopat et de nombreux fidèles, après avoir pris l’avis de la Congrégation pour les Causes des Saints, avec notre autorité Apostolique, nous concédons que le Vénérable Serviteur de Dieu Jacques de Ghazir, prêtre profès de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins, fondateur de la Congrégation des Franciscaines de la Croix du Liban, qui a dépensé sa vie, comme le bon Samaritain, dans l’assistance des infortunés et des malades, que d’ores et déjà il soit Bienheureux et qu’on puisse célébrer sa fête dans les lieux et selon les règles établies par le Droit chaque année le 26 juin, jour de sa naissance au Ciel”.
Les quatre chorales ayant animé la cérémonie étaient dirigées
par le père Khalil Rahmé.
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Le président de la République recevant la communion des mains du cardinal José Saraïva Martins.
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“La banque de la providence ne fera jamais faillite”
Les multiples œuvres réalisées par Abouna ont été, également, inventoriées par le patriarche Sfeir qui, après avoir lu l’Evangile, a axé son homélie sur ses réalisations avec l’aide de la Providence: “Le Bienheureux Abouna Yaaqoub Haddad croyait fort en la Providence. Il a entrepris des œuvres gigantesques qui nécessitaient des fonds considérables. On se demandait comment ce pauvre moine assurait ces grandes sommes d’argent. Fondant des hôpitaux, des écoles et des foyers pour les vieillards et accueillant les malades mentaux et physiques refusés par le reste des hôpitaux il répétait souvent: “La Providence me soutient. Je compte sur Dieu”. Lorsqu’on le questionna sur ses comptes, il disait: “Ne me parlez pas de mes comptes. Dieu est mon comptable. Je ne garde rien en réserve. Je dépense tout l’argent que je reçois pour servir les pauvres”. “Il disait aussi à ses religieuses, a enchaîné le patriarche, les pauvres sont des chèques entre vos mains, à l’ordre de la Providence. Si vous arrivez à bien comprendre ce que les pauvres représentent sur terre, vous les servirez à genoux. Ayez confiance, la banque de la Providence ne fera jamais faillite. Infinie était sa confiance en Dieu et en sa Providence”.
Le président Michel Sleiman et son épouse entourés du président Nabih Berri
et du Premier ministre Fouad Sanioura et son épouse.
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La place des Martyrs a connu l’affluence des grands jours à l’occasion de la béatification de Abouna Yaaqoub,
la première en terre libanaise.
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Des messages forts
A la fin de la célébration eucharistique, des messages ont été lus par le cardinal Martins, le supérieur général des Capucins, frère Mauro Johri et la supérieure générale des franciscaines de la Croix, mère Marie Makhlouf. Après avoir remercié les organisateurs et les autorités, le cardinal Martins a rappelé une parole de Jean-Paul II: “La sainteté est la voie royale pour le croyant du IIIème millénaire”, soulignant que les défis pour les fidèles en ce début de siècle, sont tellement grands que seule une vie de sainteté est capable de les relever. Et cette vie de sainteté passe nécessairement par la croix, “clé de toute vie chrétienne”, a conclu le délégué pontifical, en rappelant une parole du nouveau bienheureux: “Qui veut le Ciel sans souffrances, ressemble à quelqu’un qui veut acheter quelque chose sans argent”.
Les reliques du nouveau béatifié remises au cardinal Martins par la supérieure,
mère Marie Makhlouf.
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Une autre vue des officiels.
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Au nom des frères capucins dans le monde, le frère Mauro Johri a dit sa joie d’assister à cette béatification de Abouna Yaaqoub et a félicité les autorités et le peuple libanais.
Au premier rang des fidèles, mêlée aux religieuses de la Croix, l’artiste-peintre du Vatican, la Russe Natalia Tsarkova qui a réalisé le tableau officiel du nouveau bienheureux.
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Des représentants de diverses confessions ont participé à la cérémonie.
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La promesse des bonnes samaritaines
Clôturant la cérémonie, mère Marie Makhlouf, fidèle à son vœu de faire de la béatification de Abouna Yaaqoub un “événement rassembleur”, a affirmé d’une voix chargée d’émotion: “Quel bonheur pour la Congrégation des franciscaines de la Croix du Liban d’être présente place des Martyrs où les grands hommes du Liban ont été injustement pendus, payant de leur sang le prix de la liberté. Ce jour-là, Abouna Yaaqoub, a survécu par miracle. Ici, le sang versé par tous les Libanais, a donné au pays un cachet unique. Petit dans sa géographie, mais grand dans la solidarité et l’union des efforts de son peuple (...) une nation pour tous ses fils, le pays du bien, de la paix et de l’amour”.
Au premier rang de l’assistance, le général Achraf Rifi
et le commandant des F.L., Samir Geagea.
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Le supérieur général des capucins dans le monde, le frère Mauro Johri remerciant les organisateurs de la cérémonie.
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Et la supérieure générale de conclure par cet engagement: “Aujourd’hui, nous promettons au chef de l’Eglise du Liban, au président de la République, aux officiels, à tous les officiels, aux citoyens et citoyennes, de demeurer les Bonnes Samaritaines au service des souffrants, des malades, marginalisés, vulnérables et des écoliers qui seront toujours au centre de notre préoccupation”.
La supérieure générale des franciscaines de la Croix, mère Marie Makhlouf faisant la promesse au nom de toutes ses religieuses de demeurer les “Bonnes Samaritaines” au service des souffrants.
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Dans l’après-midi de cette journée historique, le président Sleiman a reçu à Baabda le cardinal Martins et lui a remis l’emblème de la présidence de la République.
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Première étape dans son cheminement de sainteté, cette béatification ouvre la voie de la canonisation à Abouna Yaaqoub. Il lui faudra la révélation d’un nouveau miracle pour rejoindre dans la félicité les grands saints du Liban: saint Charbel, sainte Rafqa et saint Nehmatallah Hardini. Une ascension inéluctable, puisque ses multiples réalisations témoignent éloquemment de la foi extraordinaire de l’humble et pieux apôtre de la Croix plébiscité par la voix du peuple qui l’a proclamé saint de son vivant, comme à l’heure de sa mort. |