Député de Bint-Jbeil affilié à “Amal” Ayoub Hmayed:
“Les réconciliations ne doivent pas se faire aux dépens des alliances”

“Les réconciliations réalisées ou en cours ne doivent pas se faire, nécessairement aux dépens des alliances et celle des parties chrétiennes est placée dans la glacière, momentanément, car le climat général ne la favorise pas”, déclare M. Ayoub Hmayed, député de Bint-Jbeil, affilié au Bloc de la libération et du développement dont le chef de file est le président Nabih Berri.
De la rencontre Nasrallah-Hariri, il dit qu’elle est positive, bien qu’intervenue tardivement. Le proverbe ne dit-il pas: mieux vaut tard que jamais?
Quant aux alliances électorales, elles se noueront dans les dernières semaines précédant le scrutin et chaque partie restera attachée à ses alliés.
M. Hmayed juge que “le pacte quadripartite scellé durant les législatives de 2005 a peu de chance de se renouveler, car son expérience n’a pas été encourageante”.

Quelle est votre lecture du raid américain sur la région syrienne d’Abou-Kamal et quels en étaient les objectifs?
Il s’agit d’une piraterie internationale et d’une agression flagrante contre un Etat libre et souverain, alors que les Etats- Unis prétendent se soucier de préserver la souveraineté de tous les pays.
D’aucuns ont pensé que ce raid avait pour objectif principal de soutenir le candidat républicain à la présidentielle du 5 novembre. Puis, l’Administration américaine a invoqué des considérations en rapport avec la lutte contre le terrorisme... C’est un prétexte rappelant celui sur lequel elle s’est basée pour partir en guerre contre l’Irak.
Doit-on s’attendre à d’autres agressions américaines contre la Syrie?
C’est possible, car les Etats-Unis ont habitué l’opinion mondiale à frapper en n’importe quel point du globe, en invoquant des prétextes souvent fallacieux pour justifier leurs opérations qui, la plupart des fois, ont débouché sur un échec.

La rencontre Nasrallah-Hariri
Quelle est votre analyse de la rencontre ayant eu lieu entre sayyed Hassan Nasrallah et M. Saad Hariri?
Elle va dans un sens positif. Nous avons encouragé une telle rencontre, parce qu’elle jette les bases d’une nouvelle étape que le président Nabih Berri a placée dans le cadre d’une étape printanière qui ne tardera pas à porter ses fruits dans l’intérêt de la nation tout entière. Bien qu’elle soit intervenue un peu tard, elle va dans le bon sens et nous soutenons toute initiative qui rétablit la stabilité et ouvre de nouveaux horizons pour un dialogue franc et constructif.
D’aucuns disent que cette rencontre a été rendue possible à la suite d’un feu vert émanant d’on ne sait où. Qu’en pensez-vous?
C’est possible et on a pu déceler un tournant dans les relations syro-arabes, avec l’Arabie saoudite et l’Egypte, notamment. Sans perdre de vue le rapprochement opéré entre les talibans et le pouvoir en Afghanistan. Puis, il ne fait pas de doute que des changements en profondeur se produiront aux Etats-Unis après la présidentielle et même en Europe, surtout après la crise financière mondiale, l’ordre des priorités devant subir une modification pour redresser la situation sur le plan économico-financier.
Tout cela ne peut que se répercuter d’une manière ou d’une autre sur le plan intérieur dans les pays de la région.

LA RÉCONCILIATION INTERCHRÉTIENNE GELÉE...
Etes-vous au courant des développements intervenus dans la réconciliation interchrétienne en votre qualité d’allié d’une partie concernée?

Je crois qu’elle est placée, actuellement dans la glacière, car elle n’évolue pas dans la voie menant à une solution pouvant profiter à l’intérêt national. Il semble que le climat dans son ensemble n’y est pas propice.
Le président Berri, contrairement aux autres pôles des forces du 8 mars, a laissé entendre que les alliances demeurent possibles entre les forces en présence. Que voulait-il dire par là?
En principe, il existe des constantes sur base desquelles les alliances peuvent se nouer, bien que certains affirment que les réconciliations ne peuvent se réaliser aux dépens des alliances.
Or, celles-ci ne seront décidées que durant les dernières semaines précédant les élections législatives. En ce qui nous concerne, nous n’avons jamais tourné le dos à un allié politique, quel qu’il soit, à moins que celui-ci décide lui-même de changer d’alliés.
D’autre part, nous tenons compte par-dessus tout des prises de position des uns et des autres envers des questions fondamentales, spécialement en ce qui concerne le conflit avec Israël et la vision en ce qui a trait aux projets américains dans la région.
M. Hariri a répondu au président Berri en ces termes: si les forces du 8 mars veulent s’allier aux forces du 14 mars sur base de leurs constantes, nous sommes disposés à conclure des alliances électorales avec elles.
Le président Berri a, de tout temps, laissé la porte ouverte au dialogue et à la concertation avec toutes les parties. Nous n’avons pas changé d’attitude. C’est à l’autre partie de reconsidérer ses prises de position et de rectifier ses erreurs mortelles commises dans certaines stations de la vie nationale.

PAS DE RELANCE DU PACTE QUADRIPARTITE
Peut-on assister à une revivification du pacte quadripartite?
Cette éventualité n’est pas envisagée, l’expérience que nous avons vécue n’étant pas encourageante. Imaginez-vous qu’après les élections législatives de 2005, il a été porté atteinte au consensus, à travers l’incitation internationale et arabe et même certaines forces intérieures contre la position de la deuxième présidence. De sorte que certaines forces du 14 mars ont déclaré, publiquement, qu’elles ne voteront pas en faveur du président Nabih Berri lors des élections de la présidence de l’Assemblée nationale, suite aux élections législatives. Ceci au moins en ce qui concerne la personne du président Berri. Aussi, l’expérience n’a-t-elle pas été encourageante et il n’y a pas eu fidélité aux considérations politiques sur lesquelles s’est basé le pacte quadripartite.

Oui à l’élargissement du dialogue
On parle beaucoup de l’élargissement du dialogue. Pourquoi cette détermination de la part de l’opposition à augmenter le nombre des dialogueurs?
Nous croyons qu’il y a des forces nationales qu’on ne peut ignorer, dont la présence hors de la table du dialogue ne signifie pas l’annulation de leurs rôle et position.
Nous approuvons donc l’élargissement de la base du dialogue national, initiative qui permettra de faciliter beaucoup de points qui font l’objet de tractations et consolident la réconciliation interne. Il est normal que la table du dialogue du côté du choix des représentants, reposait sur une base que celui qui a un bloc parlementaire de quatre membres et plus, peut avoir un représentant à la table du dialogue. Ceci a été fait concernant la représentativité confessionnelle, parlementaire et régionale.
Partant du souci de combler les lacunes au niveau de la représentation des blocs parlementaires ou populaires et des particularités, nous saluons cette initiative qui, à notre avis, renforcera le dialogue et donnera davantage de résultats positifs. Mais ceci ne veut pas dire que le non élargissement de la table du dialogue constitue une entrave.
Quels sont les partis ou personnes qui méritent d’être représentés à la table du dialogue?
Le président Karamé, par exemple, le président Najib Mikati, l’ancien ministre Sleiman Frangié, le député Oussama Saad, le Parti social national syrien, des forces essentielles au niveau patriotique beyrouthin. Ainsi, il peut y avoir une chance pour davantage de représentation. Le fait d’ébranler les bases de la table du dialogue touche des forces appartenant à l’opposition et d’autres au camp loyaliste. La question n’est pas limitée à une partie déterminée. Certaines parties qui avaient une orientation déterminée sont, actuellement, dans une position centriste.
Où voyez-vous le député Michel Murr dans la prochaine étape?
C’est un allié du mouvement Amal et du président Berri. Nous sommes en contact permanent avec lui et, en même temps, il a une position qu’on ne peut ignorer dans la région metniote. L’image définitive des alliances au Metn n’est pas encore précise. Nous œuvrons pour adoucir davantage l’atmosphère entre M. Murr et ses alliés qui ont mené avec lui les élections parlementaires, tant au niveau du Courant patriotique libre que celui du parti Tachnag.
Oeuvrez-vous en ce sens?
Nous soutenons une telle action, afin que cette alliance retrouve sa cohérence. Mais je répète qu’il y a certaines considérations et particularités dans chaque région. Cette question doit être prise en considération et nous approuvons toute démarche visant à réunifier cette alliance scellée en 2005.

QUID DE VOTRE SITUATION AU PLAN ÉLECTORAL
En tant que mouvement Amal, êtes-vous rassuré sur votre situation au plan électoral?
Nous ne devons pas minimiser le rôle de l’argent et l’achat des consciences. Cette question sévit de plus en plus au Liban, à travers un phénomène qui ne consiste pas seulement à distribuer des vivres, des services éducatifs et médicaux, mais à acquérir l’appui des électeurs par l’argent, les voitures, le téléphone mobile, etc...
C’est un phénomène malsain. Il s’agit d’exploiter la situation socio-économique des citoyens qui laisse à désirer, en particulier dans les régions lointaines et même dans la capitale. Nous sommes fiers de nos bases populaires et de nos alliances et le mouvement Amal se prépare, sérieusement, à participer aux élections législatives sur base du renouvellement de la confiance en la ligne nationale qu’il a suivie avec ses alliés. Nous voulons que les élections soient un référendum à cette ligne et cette action. Nous préparons une équipe de travail au niveau de chaque circonscription; cela concerne, aussi, les villages. Nous n’avons pas encore entamé des tournées électorales, mais nous avons commencé à mettre au point les bases de notre campagne.

W.H.
Article paru dans "La Revue du Liban" N° 4183 Du 8 Au 15 Novembre 2008
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