Ce cochon de payant
Par Aline LAHOUD

Un penseur et non des moindres a dit un jour que la femme est comme l’eau. L’eau donne la vie, la femme aussi. Il n’y a pas de vie sans l’une, ni sans l’autre. Allez donc raconter ça aux machos du cru. Ça fera à ces dames une belle jambe. Même l’Eglise fait la sourde oreille et oublie ou fait semblant d’oublier que le seul être humain assis à la droite du Très-Haut est une femme, Marie, la mère de Dieu.
Je ne sais pas si c’est là de la théologie, mais cela dépasse nos connaissances et certainement nos compétences. Nous avions seulement jugé dans nos cordes de citer des chiffres, des pourcentages, des exemples. Ainsi, nous avons déjà parlé, à longueur de pages, de l’octroi de sa nationalité d’une Libanaise à ses enfants de père étranger et nous avons cité le cas d’une grande propriétaire terrienne dont l’héritage faute de revenir à ses enfants, puisque la loi l’interdit aux étrangers, est allé à de lointains cousins. On nous a répondu qu’il ne fallait pas faciliter l’implantation des Palestiniens.
Nous avons demandé pourquoi la loi contre la violence domestique n’a pas encore été votée. Réponse: parce que si une femme porte plainte contre son mari, ce dernier la répudiera. Ce qui encouragera le divorce et ruinera les foyers.
Et les lois aggravant les peines contre les auteurs des crimes dits d’honneur? Laxisme ou permissivité, les tribunaux prononcent des peines dérisoires. A ce sujet, il est nécessaire de citer le cas de cette adolescente victime d’un viol collectif que son père a assassinée pour laver son honneur et qui n’a récolté que 10 ans de prison compressibles. C’est-à-dire qui seront ramenés sans doute à 3 ans pour circonstances atténuantes.
Quant à la place des femmes dans la vie officielle, le Liban est à la traîne. Elles sont 2 sur 30 ministres, c’est-à-dire 0,66% dont l’une n’a pas de portefeuille. Mais nous avons quand même failli sonner les cloches et tirer des feux d’artifice parce que l’autre s’est vu confier un ministère régalien, le plus important. Et le premier de tous, les Finances.
Nous avions pensé qu’une femme a plus d’imagination, plus de courage pour imposer une réforme radicale d’un système fiscal qui considère les Libanais moyens responsables des 50 milliards de dollars dont les trois-quarts sont allés dans les poches des gros possédants. Nous avions pensé que la ministre saurait laisser sa marque et taper du poing sur la table. Malheureusement, la nouvelle ministre, sortie de la couvée haririenne, semble s’être transformée en signorette. Pour commencer, il convient de signaler que nous sommes 4 millions de Libanais avec 50 milliards de dollars de dettes. Autrement dit chacun d’entre nous, du nourrisson au vieillard du 4ème âge, est endetté de 12.500$. A cela, il faut ajouter les taxes et impôts qui se multiplient à plaisir.
Supposons maintenant que malgré son maigre salaire, le Libanais réussit à mettre un petit pécule dans une caisse d’épargne. Déjà sur le salaire qu’il perçoit, il paie un impôt sur le revenu. Ensuite, il paie 5% sur ses économies que la nouvelle ministre compte, dit-on, majorer de 2%. Ce qui fait 7%. Plus la TVA qui est de 10% et que l’on veut élever à 12%. Résultat, l’infortuné épargnant paie trois fois l’impôt: une fois sur le revenu, une fois sur le même revenu épargné, une fois sur le même revenu dépensé. Est-ce avec cela que la clique des dirigeants et des possédants compte colmater les brèches du budget et payer une dette de 50 milliards dont cette même clique a puisé à pleines mains?
Je viens de lire que des manifestants italiens brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire: “Votez Ali Baba, au moins vous savez que les voleurs ne sont que 40. Les Libanais s’en souviendront en 2013”.

 
Editions Speciales Numéros Précédents Contacts Recherche buttom