L’ALS BOMBARDE SAÏDA
(10 MORTS ET 43 BLESSÉS) PROVOQUANT UNE RIPOSTE ÉNERGIQUE
DE L’ARMÉE
WASHINGTON ENGAGE LES «PARTIES IMPLIQUÉES»
DANS LES AFFRONTEMENTS À «LA PLUS GRANDE RETENUE»
|
|
|
|
Le cycle de la violence et l’escalade militaire sur le terrain devaient,
immanquablement, déboucher sur des duels d’artillerie meurtriers
qui se sont soldés par dix tués et une cinquantaine de blessés
parmi les populations civiles à Tyr, Saïda et sur la route
reliant Kfarhouneh à Jezzine où on a déploré
trois victimes. Ainsi, l’Armée du Liban-Sud (du général
Lahad) a semé la désolation, la ruine et la mort dans la
capitale sudiste, en bombardant la ville par surprise dans la matinée
du lundi 18 août, à une heure de grande affluence, au moment
où les habitants vaquaient à leurs occupations. L’Armée
libanaise a riposté avec énergie, prenant pour cible la source
des tirs à Aïn Toghra, surplombant Jezzine. Une charge explosive
placée dans la voiture d’un habitant de cette localité, avait
mis hors d’usage le véhicule dont les deux occupants ont été
tués sur le coup. Alors que les responsables condam-naient, comme
il se doit, ce nouveau crime impardonnable, Washington s’empressait d’appeler
les “parties impliquées” dans les affrontements à “la plus
grande retenue” en évitant, surtout, de s’en prendre aux civils.
Fait à signaler: Tel-Aviv a fait assumer la responsabilité
de l’opération à l’ALS - quelle différence avec “Tsahal”?
- mais le porte-parole du département d’Etat a déclaré
que la capitale fédérale “n’était pas en mesure de
déterminer si les tirs venaient bien de la zone contrôlée
par l’ALS”. M. Kofi Annan, secrétaire général des
Nations Unies, s’est dit “inquiet et troublé” par la recrudescence
des hostilités au Liban-Sud, d’autant que les civils en sont la
cible.
QUI A MIS LE FEU AUX POUDRES?
Il est établi que l’explosion de la bombe sur la route
de Kfarhouneh a constitué l’étincelle ayant mis le feu aux
poudres. Israël et le “Hezbollah” se sont rejeté la responsabilité
de cet attentat qui a coûté la vie à Jean Assaad Nasr
(16 ans), à sa sœur Rima (15 ans) et à une troisième
personne. Les Hezbollahis accusent les Israéliens “de chercher par
cette sorte d’attentat à ouvrir une brèche entre la Résistance
et la population civile”. Les observateurs soupçonnent l’Etat hébreu
de recourir à de tels procédés dans un objectif déterminé:
affaiblir la position de la Résistance et contraindre les populations
civiles à l’exode, en prévision de l’implantation des Palestiniens
dans les villages proches du cordon frontalier. “Après avoir tenté
de susciter la discorde entre chrétiens et chiites, a déclaré
le président Nabih Berri, Israël et ses agents s’emploient
à semer les germes de la zizanie entre sunnites et chiites, en jouant
sur la corde confessionnelle”. Quoi qu’il en soit, le “Hezbollah” fait
assumer la responsabilité du bombardement de Saïda à
Israël qu’il menace d’une riposte douloureuse et dissuasive, “car
l’ALS, soutient ce parti, n’est pas en mesure de prendre l’initiative d’une
opération de cette envergure, sans obtenir au préalable le
feu vert de “Tsahal”. Cependant, un porte-parole de l’armée israélienne
a dit que “le général Lahad avait réagi à des
attaques de civils dans la zone contrôlée par ses effectifs.
Nous sommes tous contre ce type de réaction, mais il n’en reste
pas moins qu’il s’agit là d’une affaire libanaise”. Par ailleurs,
tant Israël que le “Hezbollah” s’accusent, mutuellement, d’avoir violé
“l’arrangement d’avril 96” aux termes duquel tous deux s’étaient
engagés à épargner les civils.
|
|
|
|
SAÏDA ET TYR INHUMENT LEURS MARTYRS
Mardi, Saïda et Tyr ont observé une grève
générale, alors que les deux cités inhumaient leurs
martyrs dans un climat tendu. Cheikh Mohamed Kabbani, mufti de la République,
menait le deuil à la tête de nombreux dignitaires religieux
chrétiens et musulmans. Parmi les victimes, on compte un ressortissant
syrien dont la dépouille mortelle a été ramenée
à son village natal en Syrie. Les Sidoniens ont manifesté
leurs ressentiments politiques. Les milliers de personnes ayant accompagné
les victimes à leur dernière demeure, ont scandé en
traversant les artères cen-trales de la cité, des cris de
vengeance: “Les Juifs, ennemis de Dieu”, criaient-ils, dans une ambiance
de désolation, accentuée par les lamentations des pleureuses.
Au cœur de la ville - la Place de l’Etoile - des jeunes ont brûlé
un drapeau israélien, en scandant de nouveau: “Il n’y a qu’un seul
Dieu et les Juifs sont ses ennemis”. Cérémonie non moins
émouvante au camp palestinien de Bourj Ach-Chémali, mais
les officiels n’y ont pas fait acte de présence. M. Mohamed Raad,
député du “Hezbollah” a fulminé contre Israël
“qui paiera très cher ses crimes” et accusé l’Etat hébreu
“de vouloir dénoncer l’arrangement d’avril”. Par ailleurs, à
l’invitation du mufti de Saïda et du Liban-Sud, une réunion
s’est tenue au siège de Dar el-Fatwa, à l’issue de laquelle
un communiqué a été diffusé, appelant “à
l’unité des rangs, à la défense de notre unité
nationale contre toutes les tentatives de division provoquées par
Israël et au soutien à la Résistance”. Fait à
signaler: les stations libanaises de télévision ont suspendu
mardi leurs émissions pendant trois minutes, en signe de deuil.
De Damas où il participait à la réunion de la commission
libano-syrienne, le chef du gouvernement a stigmatisé l’agression
israélienne, accusé l’Etat hébreu de chercher à
torpiller le processus de paix et de s’en prendre aux populations civiles,
violant ainsi l’accord d’avril 96. S. Em. le cardinal Sfeir a, également,
condamné l’agression contre les civils innocents.
RÉUNION DU GROUPE DE SURVEILLANCE
Sur un autre plan, le groupe de surveil-lance de la trêve
au Liban-Sud devait siéger mercredi pour statuer sur trois plaintes
déposées par le Liban, suite à l’attentat perpétré
sur la route de Jezzine-Kfarhouneh, au bombardement de Saïda et au
pilonnage de Kfarmelki et Joun. M. Farès Bouez, ministre des Affaires
étrangères, a dit “qu’Israël cherche à vider
l’accord d’avril de son contenu et à plonger le Liban dans un état
d’insécurité. “Le comité de surveillance, a-t-il ajouté,
pourrait ne plus suffire pour prévenir une plus grande dégradation
de la situation sur le terrain, ce qui pourrait nécessiter le recours,
une fois de plus, au Conseil de Sécurité”. Cheikh Hassan
Nasrallah, secrétaire général du “Hezbollah”, soutient
que “l’arrangement d’avril a cessé d’exister depuis le moment où
les Israéliens ont repris leurs attaques contre les populations
civiles”. Et d’enchaîner: “Nous sommes pour la pacification du Liban-Sud,
à condition que l’autre partie (Israël) respecte les accords
conclus.” Les efforts tendent, actuellement, “à maintenir la situation
sur le terrain sous contrôle” en attendant la tournée que
Mme Madeleine Albright, secrétaire d’Etat US, se propose d’effectuer
au Proche-Orient d’ici à fin août.
(Voir aussi les “Evénements de la Semaine”)