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“Portails”, simple courant d’air ?
A l’instar du push et du pull (cf. RDL
1945) dont la pratique a toujours
existé mais dont l’appellation a changé, les portals
sont inhérents au Net. Celui qui se faisait auparavant appeler
search engine ou moteur de recherche, répond depuis quelque
temps au doux nom de “Portal”. Une sorte de fourre-tout et plus précisément
un site qui mène à tout, d’où son nom. Cette porte
d’entrée dans tous les domaines (arts, culture, société,
technologie…) est une des dernières expressions en vogue de la
folie Internet. Les portals (portails en français) sont
la base de toute recherche sur le Réseau ; regroupant pèle-mêle
un moteur de recherche exhaustif ainsi que de nombreux services gratuits :
cours boursiers, infos à la carte, horoscope, courrier électronique,
hébergement de pages personnelles, forums de discussions… la vague
portal n’a pas tardé à faire son trou. Le tout est
évidemment financé par la publicité. Cet étalage
de services et de gratuité a assurément une ambition :
retenir l’internaute, le plus longtemps possible et qui dit perte de temps,
dit dépense d’argent… Dans cette optique, les portiers du Net font
preuve de beaucoup d’inventivité.
Pourquoi diable les portals se multiplient-ils ? La politique commerciale
sur le Net consiste à anticiper une demande. Dans ce cas, la demande
est inférieure à l’offre, par conséquent, il faut
varier les goûts et augmenter les services afin d’attirer et ainsi
“posséder” même le plus désintéressé
des surfers. Le mot clé du commerce électronique
est : base de donnée. Plus celle-ci est étoffée,
plus on impressionne l’annonceur qui plongera tête baissée
chez celui qui possède la plus grande database et donc virtuellement
le plus de clients. Après maniement, on se rend rapidement compte
que le portail ne se contente pas d’orienter mais de téléguider
de manière très personnelle vos achats, voire votre mode
de vie. Nous vivons dans un monde où l’option est reine ; néanmoins,
cette masse de “pseudo-choix” nous fait oublier l’essentiel : ce
que nous désirons depuis toujours, ce n’est pas de se perdre derrière
des alternatives qui nous compliquent la vie, mais de la qualité.
Si les portals sont en mesure de combler cette exigence, soit,
sinon une utilisation modérée semble nécessaire.
Derrière cette flopée de services gracieux, il s’agit de
la politique du prêté pour un rendu et comme rien n’est gratuit
(bien que l’idéologie internaute s’en défende), le fait
de centraliser vos navigations, achats, consultations de courrier électronique
etc… permet à ces portails de mieux cerner votre profil de consommateur
qui ira droit chez les annonceurs… Crainte pour la vie privée ?
Pas moins qu’une navigation classique qui laisse des traces (cf. RDL 1988),
mais plus pointue et nettement plus envahissante en publicité.
Les moteurs de recherche sont programmés pour trouver ce que vous
cherchez ; ils en profitent au passage pour “orienter” vos emplettes
; en effet, le résultat d’une requête telle : “automobile”
vous affichera un bandeau publicitaire pour Mercedes-Benz. Vous avez dit
précision ? Toutefois, le phénomène portail
tient autant de la poudre aux yeux que de la surenchère :
surenchère d’information et de services pour attirer les cyber-badauds
; et poudre aux yeux, car à force de proposer des services dans
un même bouquet, on noie littéralement le surfeur sous une
masse d’information dont il voulait justement s’extirper… Certes, cette
variété a le mérite de proposer un éventail
varié, mais la hantise de la concurrence entre mêmes services,
engendre un trop plein de données, empêchant justement toute
synthèse ; en somme, passé un certain cap, rien ne
distingue un portal d’un autre.
Excite, flirte avec
une petite centaine de liens sur la page d’accueil… à tel point
qu’un écran 17 pouces avec une résolution de 1280x1024 pixels,
ne suffit pas à afficher toutes les informations et autres
links ! De quoi effrayer le plus téméraire des
surfeurs. Vous avez dit débordement ? La comparaison avec le
push n’est pas fortuite ; censée bouleverser la manière
dont on cherche l’information, cette technique s’est peu à peu essoufflée.
Trop en avance sur son temps, ou ne répondant pas à un besoin
urgent, le push n’a pas connu le succès escompté ;
il ne tombe pas pourtant dans l’oubli puisque de nombreux utilisateurs
préfèrent “recevoir” l’information chez eux plutôt
que d’aller la chercher. Il en est de même pour les portails, la
population d’Internet est suffisamment variée pour qu’un pourcentage,
même infime – représentant des millions d’utilisateurs – ait
choisi d’avoir un portail en bookmark ! Ce moteur de recherche
évolué propose des valeurs ajoutées non négligeables :
le novice se voit affublé d’un véritable visa pour le cyberspace.
Le portail français “Nomade”
l’a bien compris et en a fait son slogan : “On ne peut pas tout
savoir, mais on peut savoir où tout se trouve.”
Long terme
Actuellement, les portals sont marginalement utilisés
par des internautes déjà équipés en e-mail,
espace d’hébergement etc. Les professionnels tablent sur le long
terme, si pour l’instant, la vague des portals n’attire pas la majorité
des usagers du Net, il est à parier qu’elle va draîner un
public ciblé et ainsi d’importantes sommes d’argent à l’avenir.
L’action de “Yahoo !”, promoteur
des search engines et donc des portals a quadruplé
en six mois et s’est vue multipliée par huit en un an ! La
folie portals touche tout le monde, plus un “grand” qui ne veuille aiguiller
son monde et avoir sa part du gâteau. Netscape a fait de son Netcenter
un immense portail qui va même jusqu’à vous proposer la
dernière version de Communicator, après avoir détecté
que la vôtre est obsolète ou que vous utilisez un produit
concurrent…
MP3 : du son à l’œil !
“Comment ? Vous payez vos CD et autres albums ?
C’est has been, dépassé ; aujourd’hui, la musique
s’écoute gratos”, vous dira le jeune Net addict, féru
de sons nouveaux. Ici pas de cassette, pas de CD, encore moins de MiniDisc,
tout juste l’appareil, sans média, ou plutôt avec de la “mémoire
flash” pour seul stockage… éternellement réinscriptible,
sans perte de qualité. Nom de code : Rio ou MPMan. Petit (il
tient dans la paume de la main), léger (moins de 100 grammes) il
a libéré la musique au format MP3 – autrefois audible uniquement
sur un ordinateur – la rendant mobile, nomade, tel un ordinaire baladeur.
L’amateur de musique peut désormais écouter des chansons
en toute liberté et en toute… illégalité. Explications.
Lorsque la firme Diamond a annoncé la mise sur le marché
d’un baladeur pouvant lire les fichiers audio encodés au format
MP3 (cf. RDL 1973), il y eut une
véritable levée de boucliers de la part des maisons d’édition.
La norme MP3 (MPEG 1 layer 3) existe depuis plus d’un an, talonnée
de près par un autre standard de compression appelé TwinVQ ;
elle faisait déjà peur aux éditeurs, mais tant que
le monstre restait confiné au seul PC, cela limitait les dégâts.
Grâce (à cause, pour certains) au Rio, le Net devient une
vaste discothèque regorgeant de fichiers MP3 gratuits. Les deux
principaux produits du moment sont le “MPMan” de Saehan, société
coréenne et le “Rio” de Diamond Multimedia, spécialiste
américain en périphériques informatiques. Bien que
le marché ne soit pas encore véritablement mûr, il
s’agit d’un éden très prometteur et les constructeurs se
bousculent au portillon. Ces Walkman du futur se manipulent à
la manière d’un lecteur de CD : choix des pistes, avance et
retour rapide, pause… Le souhait caché de tout techno-freak
est enfin exaucé : les chansons présentes sur son
disque dur pourront être écoutées ailleurs que devant
l’écran du PC !
Au voleur !
Les éditeurs américains affirment qu’un marché
pour le MP3 n’existe pas, mais qu’une clientèle attirée par
de la musique gratuite est bien réelle. Et, dans cette optique,
la RIAA (Record Industry Association of America), l’équivalent de
la SACEM, a intenté un procès à Diamond afin qu’il
retire son Rio du marché. Peine perdue, la demande a été
rejetée. Le fabricant américain affirme que le Rio est une
extension de l’ordinateur et non un appareil audio comme un classique baladeur.
Et d’ajouter que tout ce que l’on peut faire avec Rio c’est écouter
de la musique et effacer les morceaux : en somme, que cet appareil
n’est rien d’autre qu’un réceptacle, non un émetteur. Cette
stratégie offensive fut payante, le Rio ayant fait partie des meilleures
ventes de ce Noël.
Bouleversement musical
Derrière cette taille et une apparence a priori innocente, se
cache une bombe, une menace terrible pour l’industrie du disque. Dans l’état
actuel des choses, une chanson copiée au format MP3 est un CD ou
un single potentiellement perdu. Les droits d’auteur ne sont donc pas respectés.
Pourquoi le Rio déplaisait avant même sa sortie et continue
d’irriter les autorités et autres organismes chargés de réglementation
audio ? A cause justement de la facilité à se procurer
du son – plus ou moins récent, mais toujours gratuit – sur le Net.
Faible encombrement, rapidité de reproduction, transportabilité,
pas de doute, le MP3 a de l’avenir. Les éditeurs ont effectivement
du souci à se faire puisque la production d’un fichier MP3 est à
la portée d’un enfant. Il suffit de placer le Compact Disc
dans le lecteur et en quelques clics de souris, le logiciel (appelé
encoder) transforme les pistes en fichiers MP3 recopiables à
l’envi, sans dégradation ; seul hic : il faut posséder
l’original au risque de tomber dans l’illégalité. Les baladeurs
MP3 menacent toute la hiérarchie d’une mécanique bien huilée :
l’industrie phonographique. Imaginez la disparition du producteur qui prend
sa commission, du monteur, de l’éditeur, du concepteur de la jaquette
; autant d’intermédiaires qui augmentent considérablement
le prix d’un CD à son arrivée en boutique et donc dans les
mains de l’acheteur. Plus d’éditeurs ? Pas si utopique, puisque
dès lors que les coûts auront baissé et que les destinataires
auront été déterminés, le gain devient valable
pour les groupes de musique – qui percevront plus, puisque les négociateurs
“grippes-sous” auront disparu – et pour les acheteurs, qui paieront moins
cher leur disque pour les mêmes raisons ! Mais en y réfléchissant
bien, on s’aperçoit qu’il y a encore de la place pour les producteurs,
étant donné que la majeure partie du temps d’un groupe est
dédiée au développement de la musique ; ces derniers
n’ont donc pas la possibilité de se perdre en tractations, la hiérarchie
reste donc la même… Le sens caché de ces baladeurs nouvelle
génération pourrait être : de la musique purement
et simplement ! Une sorte de retour aux sources, dans un monde managé,
segmenté en parts de marchés et en rentabilité. De
l’authenticité en quelque sorte ? Oui, mais pas pour longtemps.
Ayant compris qu’arrêter un tel phénomène était
impossible, les industriels se penchent afin d’en tirer le meilleur profit.
S’il y a de la vente, on doit pouvoir y gagner quelque chose, se disent-ils.
De fait, nombre d’auditeurs sont prêts à acheter, à
condition que les prix baissent sensiblement. La menace peut être
transformée en opportunité de conquérir un marché
naissant. C’est ainsi que l’industrie du disque aidée de géants
de la communication et de l’informatique (AT&T, IBM…) tente de mettre
au point un moyen sécurisé de vendre de la musique sur Internet
pour le courant de l’été 1999.
Mutation
Ces petits appareils vont révolutionner la production, l’achat
et l’écoute de la musique moderne. L’ambiance musicale dans une
soirée vous déplaît ? Vous avez deux mots à
dire au DJ de tel night-club ? Chargez votre Rio, branchez-le
sur une chaîne et prenez le contrôle. En se projetant dans
un avenir proche, on peut également percevoir les avantages du format
MP3. Les jeunes groupes musicaux n’ont souvent pas les moyens de se faire
connaître à moins de passer par le biais du circuit classique
– ce qui n’est guère évident. Grâce au MP3, ils produiront
eux-mêmes leur master et le rendront accessible à des milliers
de fans éventuels. Toute une remise en question va être nécessaire
et des compétences nouvelles seront exigées face à
un marché musical forcé de s’adapter ou de disparaître.
L’industrie du disque risque de se retrouver sens dessus-dessous, à
moins qu’elle anticipe ce qui semble désormais inévitable.
A l’évidence, dans un premier temps, les supports traditionnels
cohabiteront avec le format MP3, pour ensuite s’en servir en vue de prolonger
leur durée de vie, devenant un média de stockage des fichiers
MP3. Un CD-ROM peut contenir quelque 190 titres, soit une douzaine d’albums !
De la même manière que le piratage de cassettes et de CD n’a
pas préalablement tué l’industrie musicale, il s’agit de
trouver dans ce cas, le juste milieu afin de satisfaire consommateurs,
producteurs et distributeurs… Délicat casse-tête en perspective.
Il va sans dire que les baladeurs actuels auront une sérieuse concurrence,
dès lors que les prix de leurs cousins au format MP3 auront baissé.
Le MPMan pourrait bien être le digne remplaçant du Walkman.
Ce successeur profite de nombreux avantages et d’une technologie autrement
plus pointue ; la résistance aux chocs est accrue : aucun
danger que le son “saute”, puisqu’il est stocké en mémoire
et non sur un média ; les sportifs apprécieront… Dèjà,
des ingénieurs travaillent sur des chaînes Hi-Fi de salon
et des autoradios reconnaissant le format MP3. Les prévisions sont
à tel point optimistes que des MPStations, sortes de distributeurs
de musique sont déjà à l’étude. Ces cabines
seraient placées dans les lieux publics (aéroports, gares,
grands magasins, cybercafés…) et leur utilisation simplifiée
au maximum : caser son MPMan dans un emplacement prévu à
cet effet, sélectionner les chansons et après avoir inséré
le montant nécessaire, les fichiers sont prêts à être
transférés en quelques secondes grâce à une
connexion haut débit. Chronique d’une mort annoncée pour
la cassette et le CD ? A terme, l’analogique disparaîtra au
profit de nouveaux supports numériques qui éclipseront à
leur tour les anciens CD, MD… seul inconvénient, tout doit inévitablement
transiter par un PC, pour l’instant. Faisons un rêve d’un appareil
non plus seulement recevant mais aussi émettant du son vers d’autres
périphériques grâce à l’ajout d’un port infrarouge,
demain peut-être ? Pour l’heure, en version de base, le Rio
propose 32 mo de mémoire soit 35 minutes de musique en qualité
CD, un peu plus d’une heure avec un taux de compression supérieur.
Des extensions de 32 mo supplémentaires seront disponibles, de même
que des SmartMedia, cartes de stockage utilisées pour l’imagerie
numérique. Econome, il se contente d’une pile AA pour 12 heures
d’écoute.
Rio de Diamond (32Mo) $199
MPMan de Saehan (64 Mo) $499
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